Jour 18 - Nazca

Et voilà Nazca. Peut-être avez déjà entendu parler de cette ville dans une émission sur les extra-terrestres. Pourquoi? Parce que dans les environs, se trouvent les Lignes de Nazca, de grands dessins tracés dans le désert. Les extra-terrestres sont une des explications loufoques de ces figures.

La région est également très sèche, comme l'atteste la photo de gauche: la rivière... n'a pas d'eau, elle sert donc naturellement de route! A droite, le coucou qui nous a permis d'observer les figures depuis les airs. Le prix du vol était de s/130 (32,5€) pour une trentaine de minutes. Il n'y a que quelques compagnies proposant le tour. Nous avons écarté l'offre d'un rastaman, trouvé en suivant les indications d'un papier que l'on nous a donné dans la rue. Le jeune homme, venant de se réveiller, la tête dans le brouillard et sentant la fumette, ne devait pas fréquenter les mêmes lignes que nous...


Avant de prendre l'avion, j'ai pris un "café" pour le petit déjeuner. Cet élément a son importance, vous allez comprendre pourquoi dans quelques instants. Je savais déjà que la balade allait être mouvementée, le pilote faisant pencher l'engin d'un côté puis de l'autre afin que tous les passagers puissent observer le sol.

Après une longue attente dans le hall de l'aérodrome utilisé par toutes les compagnies, nous mettons nos vies entre les mains de Raul, qui est aux commandes, moi, Yann, Antoine et trois autres touristes. Là, la première attraction est le vol en lui même, ensuite viennent les lignes. Ce sont soit des représentations, généralement d'animaux, soit des figures géométriques, lignes droites ou triangles principalement. Il y a notamment un oiseau, photo à gauche, et un arbre à côté d'un parralépipède, à droite.


Il y a aussi un singe, un bonhomme surnommé l'astronaute, un condor, un colibri, une araignée, un chien, un iguane... et de nombreuses lignes droites. Ces dessins (plus de 350) ont été tracés par la civilisation Nazca, une culture pré-inca s'étant développée entre 300 avant JC et 800 après JC.

3 minutes avant la fin, magie, mon "café" (enfin, une tasse d'eau du robinet à la couleur noireâtre avec du dépôt au fond) réapparaît, je transpirais déjà à grosses gouttes. J'ai tenté de le garder, en vain, la vue d'une autre passagère passant mal ainsi que les soubresauts et le tangage du zinc ont eu raison de moi. Mes deux collègues n'étaient pas loin de m'imiter.

Une fois les pieds sur terre, après un repas revigorant, nous avons fait une rencontre digne des extra-terrestres. Au Maria Reiche Center, du nom de la scientifique allemande qui a passé sa vie autour des géoglyphes de Nazca pour les étudier et les protéger, nous avons rencontré une femme "ven[ue] du cosmos", en fait, la disciple et amie de Maria Reiche, Viktoria Nikitzki.

Le centre était conseillé par le Guide du Routard et nous cherchions des explications sur ces intriguantes lignes, nous avons donc naturellement souhaité nous y rendre. Une fois devant, nous étions un peu surpris, à peine une inscription pour indiquer l'endroit qui paraît plus comme un vieil hangar abandonné. Nous toquons à la porte, et oh surprise, quelqu'un ouvre: c'est Viktoria.

Elle nous fait entrer, quelques chats errent, une poule attend patiemment au mileu d'une sorte de cour. On se dirige vers un petit hangar. Là, Viktoria nous propose une conférence sur les lignes, c'est à nous de décider quand cela commence. Euh, oui oui, bien sûr, nous on veut des explications sur les lignes... mais, euh, cela se passe comment? Il n'y avait rien. Pas de panneau, pas d'explications, enfin rien quoi! Un peu surprenant pour un "centre" qui propose une conférence sur les lignes.

On comprend finalement que c'est Viktoria elle-même qui fait l'exposé à propos des lignes, on lui donne alors le top départ! Elle soulève alors une grande bâche poussièreuse et laisse découvre une maquette, de 4 mètres sur 2 environ, de la zone des lignes.

Ensuite, pendant 1h ou 2, elle nous raconte quelle est la fonction des lignes suivant les recherches de Maria Reiche. Aujourd'hui, le seul intérêt des lignes pour la population locale, c'est l'attrait touristique. Rien n'est fait pour protéger les lignes, menacées par l'érosion et le réchauffement climatique, elles risquent de disparaître. La destruction d'une forêt dans la région met en péril ce vestige de plus de 2000 ans (plus de vent, plus d'inondations).

En fait, les lignes sont un calendrier astronomique. Je m'explique. Les lignes indiquent différentes constellations importantes ou encore la position du soleil aux équinoxes et aux solstices. L'observation des lignes permettait donc de savoir à quel moment effectuer les travaux agricoles, semis et récolte, la survie de la population passant par la possibilité de nourrir tous les habitants.

L'eau est également une condition sine qua non à la vie, pour boire mais aussi pour l'irrigation. La région, souvenez vous de la rivière au début de ce message, est très sèche, semi-désertique. La civilisation Nazca, ingénieuse et proche de la nature, avait développé des parades pour vivre dans ce milieu difficile. Des aqueducs et un réseau de canaux datant de cette époque, fonctionnent toujours et servent encore à l'irrigation de terres cultivées. Pour irriguer, il faut savoir où se trouve l'eau, une partie des dessins serait consacrée à cela. En effet, différentes lignes marquaient l'emplacement approximatif de fils d'eau souterrains.

Certaines lignes auraient également une fonction liée aux tremblements de terre en indiquant la position de failles dans la montagne.

Les différents dessins d'animaux ou les autres formes géométriques seraient des indications données pour aider à la compréhension des tracés. A l'époque, il n'existait pas de système d'écriture, le seul moyen de transmettre le savoir aux générations suivantes étant la voie orale... et les tracés sur le sol. Malheureusement, la civilisation Nazca a décliné puis disparu (ayant sans doute subi des catastrophes naturelles plus importantes que d'habitude, entre inondations et séismes), le savoir est parti avec eux et la population actuelle de la région ne comprend pas la signification des figures.

Maria Reiche est une des rares personnes à avoir chercher à trouver une signification rationnelle à ces lignes. Toutes ses théories reste des théories, mais cela reste les plus plausibles. Elle a passé près d'un demi-siècle à les étudier, souvent seule dans le désert. Elle a notamment essayé de sensibiliser les locaux à la protection des lignes, mais pour eux, le principal intérêt reste touristique. Les autorités locales ne se rendent pas compte de la menace réelle planant sur leur trésor, ils préfèrent profiter de la poule aux oeufs d'or sans effort. Viktoria a très bien connu Maria Reiche et a en quelque sorte repris le flambeau de ses études.

Mais comment ces dessins survivent au temps qui passe? Les dessins ont été dessinés en grattant le sol. Les roches sombres ont été dégagés et laisse apparaître le sable plus clair. Les dessins restent visibles pour plusieurs raisons: faibles précipitations (30mm par an), pas de végétation donc une couche d'air chaud au niveau du sol le protège du vent et le gypse contenu dans le sol joue le rôle d'une colle, retenant le sable et la poussière

Nous avons ensuite laissé Viktoria dans son désert et ses mystères puis pris un bus pour Ica par la Panaméricaine. Dans ce bus, j'ai pu discuté avec Javier, ramasseur de tomates, vadrouillant dans le pays pour travailler (quand il en a envie). Je n'ai pas compris la moitié de ce qu'il baragouinait, et pas seulement parce que mon espagnol n'était pas encore assez rodé...

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