Myanmar - Thanlyin et Kyauktan

Au petit matin, revoilà la gare routière Aung Mingalar. Comme la capitale économique n'a déjà plus de secret pour nous (façon de parler bien sûr), un taxi nous emmène à Thanlyin, un poil plus au sud.

Avant de grimper les escaliers de la paya Kyaik Khauk, il faut nous sustenter, nos estomacs crient famine. Une petite dame et son boui-boui nous sauve. Après un petit déjeuner fait de café et de riz, je demande combien cela coûte. Le dialogue est difficile, notre sauveuse ne parle pas un mot d'anglais. Elle montre finalement des billets. 1600 pour un café et un peu de riz ! C'est un peu cher. Ah non, c'est pour nous 4. Ouh là, en fait c'est vraiment donné !

Au pied des escaliers, un homme nous indique gentiment des étagères pour ranger nos chaussures. Notre tour effectué, au moment de les récupérer, il nous réclame 1000 kyats chacun ! Une femme à côté reprend ses chaussures contre 100 kyats. Bonjour l'arnaque, non merci.

Nous cherchons un petit peu de rivière pour passer l'après-midi. Elle n'est pas loin, alors je suis partant pour poursuivre à pied avant de revenir à 17h récupérer notre chauffeur de taxi qui reviendra nous chercher à la paya

C'est donc à pied que nous poursuivons le long de la route, cap au sud toujours. Après plusieurs kilomètres, les troupes en ont ras le bol. Cette rivière n'arrive jamais. Nous finissons par trouver des gars prêts à nous emmener en scooter pour 1 dollar chacun. Ok, mais nous lui précisons bien que nous voulons cherchons "a nice place" (un endroit sympa) avec, par exemple, un restaurant ou un endroit pour se poser tranquille. Pas de problème selon eux.

Finalement, on fait 3 kilomètres pour finir au bord du port pétrolier ! Quiproquo. Alors oui, on peut acheter une banane à la gargote du coin mais ce n'est pas vraiment l'endroit désiré pour un dernier jour de vacances. Un taxi traîne à quelques mètres. On remercie nos scooters à défaut de les maudire. Un seul taxi dans les parages. Il veut bien nous emmener à Kyauktan contre 15 000 kyats. Un prix trois fois trop élevé. La négociation démarre.

"How much you pay ?", je réponds 5. Il veut 10. Une demi-douzaine de mecs s'amasse autour de nous pour participer au débat. 5. 10. 8 alors. Non, 10. On lâche 8, "2+2+2+2". Il veut toujours 10, appuyé par ses copains.

Un des gars nous aborde : "8 you go ?", "yes". Pendant ce temps, un autre taxi est arrivé. 8, c'est bon pour lui, on est parti, nos sacs finissent dans son coffre. L'autre taxi nous court après, "8 ok". Ah non mon gars, cela ne se passe pas comme ça ! On reste avec l'autre. Quelques noms d'oiseaux d'Asie fusent entre les chauffeurs. Affaire réglée.

Enfin, un petit coin sympa. Kyauktan, au bord de la rivière Bago avec la paya Yélé trônant sur son île au milieu. Les fidèles traversent en bateau pour aller nourrir les poissons-chats entre deux prières. Nous restons quant à nous sur la berge.

L'après-midi passe gentiment entre un repas, une petite balade et un peu de lecture. Moins galère que le matin, c'est en bus que nous rejoignons notre point de rendez-vous à la paya. Une dernière glace et voici l'aéroport. La carlingue nous emporte un peu fatigués, mais ravis de notre périple. Dada Myanmar !

Myanmar - Le lac Inle

En bateau Simone !

Pour le lac aussi, il y a un droit d'entrée. 10 dollars. Nos guides nous abandonnent et notre pirogue nous attend. Elle nous emmène jusqu'à Nyaung Shwe. Nous remontons vers le nord la trentaine de kilomètres du lac.

C'est l'occasion de voir les fameux pêcheurs qui participent à la renommée du lac. Pour pêcher, ils placent un filet et encerclent une zone poissonneuse. Ils ratissent ensuite cette zone avec leur nasse et la parcourent avec une lance. Pour ce faire, il faut trois mains : une pour tenir la nasse, une pour tenir le bâton et pour la rame. Les pêcheurs étant normalement constitués, ils ont développer leur technique : ils rament avec leur jambe. La rame est coincée par l'intérieur du mollet et l'arrière de la cuisse.

Nous n'avons vu aucun poisson être capturé pendant que nous les observions. Je ne peux pas juger de l'efficacité de la technique mais au moins, cela ferre les touristes.

Nous ne logeons pas dans l'un des luxueux hôtels sur pilotis. Nous trouvons le notre dans le centre-ville de Nyaung Shwe. Nos chambres sont équipées de télé, première fois depuis Séoul. Cela nous permet de suivre à distance les tragiques évènements qui agitent le monde. Et là, la réplique pour rassurer maman avant de partir prend une résonance particulière : "ne t'inquiète pas, je serai plus en sécurité au Myanmar qu'à Paris !".

Le lendemain, nous trouvons (ou il nous trouve selon le point de vue) un gars pour nous promener en bateau sur le lac. Nous lui précisons les endroits que nous voulons voir, pas de soucis, il sait où mener sa barque. Nous faisons donc le tour des artisans du lac : bijoux en argent (attention les filles), ombrelles, papier, couteaux, cigares, objets en laque... le choix est large.

Nous côtoyons également les jardins flottants alimentant, entre autres, le pays entier en tomates. Deux jeunes filles en profitent pour essayer de nous vendre quelques fleurs. Elles partent à l'abordage de notre pirogue mais Benoit ne se laisse pas prendre et renvoie la fleur à son envoyeur !

Avant de quitter le région du lac Inle, nous louons des vélos. Objectif, apprécier le plan d'eau d'un nouveau point de vue. Nos bécanes nous emmènent jusqu'à un monastère. Des birmans bitument l'accès. Plus facile pour grimper. Autour du monastère, nous trouvons notre spot. Il nous a un peu fallu déblayer le terrain pour écarter les arbres du champ de vision, mais on a eu notre photo !

Sur la route du retour, nous nous arrêtons au vignoble Red Mountain. Sauvignon blanc ou pinot noir poussent sur les coteaux. Parait que la météo n'est pas optimale et que l'eau doit être amenée par un pipeline, pas bon pour les finances. Il en résulte des bouteilles chères pour un vin... qui permet de satisfaire la carte des restaurants touristiques du pays. La carte propose une dégustation de 4 d'entre eux. Il faudra retenir que le Inley Valley Rosé est correct. Mais tout ça ne restera pas dans nos mémoires. Il en faudrait plus pour nous bercer pendant le trajet de nuit en bus... retour à la case départ : Yangon.

Myanmar - De Kalaw à Inle

Nous retrouvons Kaitu, notre guide, ainsi que Win Ou, notre cuisinier. On est un peu surpris d'avoir un cuisinier inclus dans la prestation. Mais on ne va pas se plaindre.

Kaitu m'explique qu'il est d'origine népalaise, comme beaucoup de gens de la région. Il n'a jamais été au Népal mais ses parents y sont nés. Les britanniques ont amené des népalais en Birmanie pour en faire des soldats, solides et robustes pour tenir dans les montagnes. Pendant la haute saison, les treks c'est tous les jours pour lui. Il n'y a que trois mois de pause par an pour les 200 guides de Kalaw.

Des forêts de pins, des petites vallées, des jardins où poussent fraise ou ananas pour être vendus aux marchés des environs. Nous arrivons à la paillote de la veille à l'heure du déjeuner. C'est une famille d'origine indienne. Chapati et salade d'avocat, un régal !

A nos pieds, une poule est suivie par ses poussins, eux-mêmes suivis... par les chiots qui rôdent. La propriétaire rouspètent après eux mais ils persistent. Un des poussins se perd. Un des chiots en profite pour se jeter sur lui. La petite boule jaune disparait en 3 coups de dents !

La marche continue. Les vallées s'enchaînent et nous arrivons dans notre village étape avant la tombée de la nuit. Les enfants rentrent de la classe. Certains parcourent plusieurs kilomètres à pied sur les pistes pour rentrer chez eux.

Avec Benoit, on se refait un petit tour. On escalade la colline qui surplombe le village. Au passage, on surprend quelques femmes en train de faire leur toilette à flanc de montagne ! De là-haut, on voit toute la vallée. Cela n'empêche pas le soleil de se cacher derrière le relief. La redescente se fait au pas de course avant le noir de la nuit.

Le temps de se passer un coup de seau sur la tête (pas de salle de bains évidemment) et Win Ou termine de préparer notre festin : frites, poisson mariné et frit, du tofu, des haricots, un dessert sésame et caramel... Nos papilles jubilent. D'ailleurs, les deux jours suivants, Win Ou continue de nous épater. Que ce soit de viandes, de légumes, de fruits, de gâteaux, de soupes... et même de crêpes et de bananes flambées à l'alcool de riz !

Pendant ces deux jours et demi, c'est une soixantaine de kilomètres qui nous font passer par monts et par vaux, à travers champs de maïs, de blé, de piment ou de gingembre

Avec Benoit, nous aurons même le droit à un petit détour. Notre groupe s'est séparé quelques minutes plus tôt, Win Ou emmène les filles directement par la route, chemin plus rapide. Cela devrait soulager Sophie qui souffre depuis le début du trek. Ses chaussures ne font pas de lumière mais lui donnent pas mal d'ampoule. Aïe.

Du coup Kaitu nous fat passer à travers champs. Il cherche un peu sa route, tâtonne. Le chemin n'est plus là. Nous finissons au milieu d'une épaisse végétation. Il est même difficile de progresser. Je vous rassure, il n'y a qu'un centaine de mètres à passer, mais il ne faudrait pas tomber sur un serpent ! Nous débouchons enfin à l'air libre après une petite séquence Bear Grylls. Kaitu s'excuse, il ne pensait pas que la végétation avait repoussé aussi vite et il n'a pas reconnu le passage habituel. Pas de soucis, on s'est bien marré avec Benoit ! Et nous arrivons au village avant les filles, Win Ou, même sur la route, s'est aussi un peu égaré...


Au bout le lac Inle.

Myanmar - Kalaw

2h du matin et le bus nous balance au bord de la route au milieu de nulle part. Ah non, au milieu de Kalaw. Cette fois, pas de cavalcade nocturne. Nous trouvons une auberge à 20 mètres de là. La porte s'ouvre quand on toque et il y a de la place. Banco.

Après avoir terminé notre nuit dans de bons lits, nous nous baladons dans la ville. D'abord, réserver le trek pour le lendemain. Ensuite, profiter de la journée pour avoir un avant-goût des environs. Nous traversons le marché, sortons de la ville vers un temple qui abrite un "bamboo buddha". Rien d'exceptionnel, nous passons... et tombons sur une terrain de jeux.

Là, on dirait que toute la jeunesse du coin s'est donné rendez-vous. Un match de foot, un poteau d'escalade en bambou, des gens qui pique-niquent. De la bonne humeur en pagaille.

Nous continuons la balade à travers un champ, retrouvons une piste qui serpente dans les montagnes. Deux heures de marche sur le chemin poussiéreux et au bout, la récompense avec un superbe point de vue sur une vallée, bien installés sur les bancs d'une paillote bien tranquille. La femme qui tient la boutique est surprise de nous voir arriver à cette heure, "no guide" me demande-t-elle. C'est moi qui fait le guide !

La redescente est plus rapide. Il ne reste plus qu'à enlever un maximum de poussière des chaussures. Nous goûtons à la nourriture népalaise dans un restaurant de la ville malgré une coupure de courant, la cuisine continue !

Myanmar - Bagan

Aujourd'hui, c'est vélo. Un des points forts du séjour, un lieu qui a pesé dans mon choix du Myanmar : la plaine de Bagan. "L'un des plus beaux spectacle au monde" si l'on se fie aux récits de Marco Polo. Pendant 230 ans, les rois de Bagan ont fait construire plus de 4000 temples dans une frénésie religieuse sans commune mesure. En 1287, une invasion mongole met fin à cette folie créatrice.

Depuis, pillages, érosion et séismes n'ont pas arrangé les temples. Les restaurations n'ont pas toujours respecté leur architecture initiale non plus. Il n'en reste pas moins un des sites les plus incroyables que l'homme n'ai jamais créé.

Pour apprécier l'endroit, rien de mieux que flâner à pied ou à vélo entre ces vieilles pierres. Une nouvelle mode semble aussi se développer : la location de petits scooters électriques. A vélo, c'est tout de même mieux, même si c'est plus difficile sur les pistes ensablées ! Mais c'est encore plus difficile lorsque l'une des pédales se fait la malle comme cela arrive sur celui de Sophie ! Heureusement que l'on trouve des gars sympas qui veulent bien nous filer un boulon. Deux fois dans la journée.

Le site est vaste. Et pourtant, en haut des temples, je tombe dans la même journée en face de deux gars différents avec qui j'ai discuté un peu plus tôt dans mon voyage. Un belge croisé avant le trek à Hsipaw et un perpignanais tourdumondiste croisé en attendant mon bus pour repartir de Hsipaw. Le Myanmar est
petit. Par la taille, pas par l'esprit !

Bagan est aussi réputé pour ses levers/couchers de soleil du haut d'un temple. Le coucher du jour étant une nouvelle fois trop nuageux, nous nous levons tôt le second jour. Cela vaut le coup d'aller pédaler quelques kilomètres, de grimper les marches abruptes au petit jour et de supporter le boucan des touristes chinois pour voir les rayons du soleil raser les briques millénaires et suivre des yeux l'envol des montgolfières survolant la plaine.

Nous nous baladons de nouveau autour des temples. L'après-midi, nous passons dans un marché et c'est l'occasion de comprendre le mystère du thanaka : la crème est tirée de l'écorce d'un arbre, le thanaka, frottée contre une pierre avec un peu d'eau. Les femmes s'en badigeonnent les joues à la fois comme produit de beauté et maquillage. Pour le plus grand bonheur de ces demoiselles !

Myanmar - On se la coule douce

Nous partons tôt pour embarquer sur notre bateau direction Bagan. Nous embarquons avec des hordes de touristes. Sur la berge, ce sont des hordes de moustiques qui nous guettent.

Nous voguons déjà sur les flots quand nos réalisons qu'il est 8h, nous avons oublié de nous souhaiter la bonne année ! Voilà chose faite.

Le bateau slalome entre les bancs de sable. La journée se passe gentiment entre sieste, lecture et admiration du paysage. Des péniches remontent le fleuve à contre-courant. Les moteurs crachent.

Nous arrivons à Bagan vers 17h, avec plus de 2 heures de retard. Il fait déjà nuit. Il nous faut payer un droit d'entrée à l'arrivée à l'embarcadère : 20 dollars. "Expensive" comme s'exclame un vieux ricain mécontent. En effet, le prix a augmenté ce même jour, 1er janvier. Hier, c'était 15 dollars...

Myanmar - Deuxième phase du voyage

Nous restons une journée supplémentaire à Mandalay et en profitons pour louer des scooters. Benoit et moi aux commandes, les filles à l'arrière. Les premiers tours d'accélérateur sont un peu sportifs, pour passer les vitesses et savoir s'imposer dans le trafic. Et je dois avouer que j'accuse un peu le coup physiquement après mon épopée pédestre et matinale de la veille.

Mais nous prenons nos marques. Nous nous rendons à Sagaing, de l'autre côté de l'Ayeyarwady, pour grimper la colline où se trouvent une multitude de petite pagode. 6000 bonzes et nonnes y résident aujourd'hui.

Nous retraversons le fleuve et empruntons l'autoroute. Celle-ci est vide, pas grand monde à part une charrette ou deux. Nous visitons Inwa, qui fût capitale pendant 400 ans. Du faste de l'époque il ne reste qu'une flopée de vestiges, remparts et pagodes. Nos scooters souffrent sur les chemins défoncés. Nous en faisons rapidement le tour, plus rapide que pour les touristes qui choisissent le tour en calèche. A noter, cette épatante tour de guet... qu'il n'est plus possible d'escalader, celle-ci jouant les tours de Pise, différents tremblements de terre mettant à mal son assise. A son pied, des birmanes veulent nous vendre des babioles. Elles ont l'habitude des touristes, notamment français car elles déclarent dans la langue de Molière : "c'est pas cher", "je l'ai fais moi-même"...

Sur le retour, nous repassons par le lac Amarapura, une nouvelle tentative pour admirer le coucher de soleil... Pas de bol, le ciel est encore couvert.

Le soir, c'est dans un restaurant thaï que nous passons le réveillon. On sent l'effervescence des jeunes dans la ville. Par contre à minuit, nous dormons déjà, fatigués. On se souhaitera bonne année à 6h30 demain, il sera minuit en France.

Myanmar - Retrouvailles

6h de bus, ce n'est malheureusement pas assez long pour faire une nuit complète. 2h30, j'arrive à la gare routière de Mandalay. J'ai dû dormir 4h à peu près. J'ai le choix entre trouver une auberge pour terminer la nuit ou me balader. Je veux profiter une dernière fois de ma totale liberté avant de rejoindre Benoit, Sophie et Cindy qui doivent arriver dans la matinée de Yangon, alors je choisis la balade.

Sac sur le dos, les chauffeurs de taxi assistent incrédules à mon départ à pied. Il n'y a pas un chat dans les rues... mais pas mal de chiens ! Et la plupart ont l'air assez surpris de me voir passer. Et ils me le font savoir. Ils m'aboient dessus, me suivent et grognent à mon passage. Pas très rassurant. Certains sont des loups solitaires, d'autres en meute. L'une d'elles me suit sur une centaine de mètres. Je dois être plus menaçant que les chiens pour qu'ils daignent me laisser tranquille.

J'arrive enfin aux remparts bercé par les prières bouddhistes diffusées par des hauts-parleurs dans la ville. Je vise la colline de Mandalay pour admirer une nouvelle fois le lever de soleil. Un des escaliers qui y mène est encore fermé et surtout, un nouveau chien me barre la route, les crocs de sortie. Pas très fier, je m'éloigne. Je croise la route d'un petit papy, un des rares à être déjà debout dans le coin. Il me demande où je veux aller. Je réponds "up", en pointant le sommet de la colline du doigt. "Please follow me" me dit-il. Je le suis.

La route zigzague jusqu'au sommet. Nous échangeons quelques mots. Il m'explique qu'il fait le trajet tous les matins depuis 15 ans ! Cela fait de l'exercice. Il se met à marcher à reculons. Je l'imite et cela le fait sourire. Il m'amène à un belvédère, un bon spot pour le lever de soleil me dit-il. Cool. Il me demande si je veux aller voir le monastère tout en haut. Oui : "please follow me". Je le suis encore même quand il pique un sprint dans les quelques marches pour revenir sur la route depuis le belvédère. Avec mon gros sac sur le dos, mes 4h de sommeil et ma dizaine de km dans les jambes, je fatigue un peu. Il me propose gentiment de porter mon petit sac mais j'ai mon orgueil, alors je refuse poliment !

Il me guide jusqu'à l'entrée du monastère. Celui-ci est normalement fermé, il n'est pas encore 5h du matin. Le portail est entrouvert, nous nous glissons à l'intérieur. Je le suis à travers un dédale de salles, de couloirs et de statues de bouddhas. Enfin, nous voilà au sommet : pleins de dorures et un moine posté à un micro, c'est lui qui prie dans les hauts-parleurs depuis des heures !

Mon sauveur me laisse là. Il redescend en ville alors que d'autres birmans montent à leur tour pour leur exercice matinal également. Je vais me poster à mon belvédère. Je fais des photos pendant que des birmans font des abdos à côté. Le ciel est un peu nuageux mais cela n'arrête pas le soleil.

Je redescends enfin, il serait bien que je sois à l'auberge quand les amis arrivent. Encore quelques kilomètres à pattes et j'arrive... après eux. Leurs sacs sont déjà là. Je laisse le mien aussi. La chambre n'est pas encore libre alors je repars à pied même si mes 18 kilomètres matinaux m'ont harassé ! Je vais voir les ateliers des artisans de feuilles d'or.

Je retrouve enfin la fine équipe vers midi. Et la chambre est enfin prête. Ils ont fait bon voyage. Nous déjeunons à un buffet shan avant de louer un pick-up pour aller voir les ateliers de soie et le pont U Bein. Moins poussiéreux qu'à vélo ! En revanche, le ciel est couvert et le spectacle du coucher de soleil en pâti. Je suis bien content d'être déjà venu quelques jours plus tôt !

Myanmar - Lever de soleil

Le feu, à 50 cm de mes pieds pendant la nuit, m'a bien réchauffé. Je me lève aux aurores. C'est l'avantage quand on se couche tôt ! J'en profite pour aller guetter l'apparition du disque solaire.

Des nuances de roses s'échappent sur ma droite. Le ciel s'éclaire peu à peu. Nuages et montagnes se confondent au loin. Tout n'est encore que ombres chinoises à l'horizon qui soudain prend vie, ou plutôt prend feu. Je crois voir un volcan d'où la lave sort patiemment. Une coulée fend le flanc de la montagne... qui est en fait un amoncellement de nuages. Tout s'embrase. La montagne se consume et le responsable émerge enfin. Quelques minutes et je le vois déjà en entier. Les derniers remparts de vapeur d'eau sont effacés dans une explosion de couleurs.

Les yeux encore brillants de ce spectacle, je rejoins mes camarades pour le petit déjeuner. J'en profite pour demander à James pourquoi certaines femmes du village ont les cheveux rasés. Il ne sait pas mais pose la question à notre hôte. Autrefois, des soldats de l'armée birmane kidnappaient les plus belles femmes pour en faire leur épouse. Se raser la tête était un moyen de cacher leur beauté... c'est pourquoi les femmes les plus âgées continuent la boule à Z.

Nous commençons la journée en passant devant une école. Encore des enfants souriants et pleins de vie. La classe commence, ils laissent leurs souliers à leur place dehors. Chaque enfant à son nom au mur pour ne pas se tromper de place !

Nous terminons notre trek en redescendant vers Hsipaw. Un dernier repas (où j'ai toujours le droit à double ration) et un pick-up nous attend pour nous emmener à une dernière étape : un bain dans une source d'eau chaude. Cela fait plaisir de se baigner mais l'eau n'est pas des plus limpides.

Notre petit groupe se sépare. J'arpente les rues de Hsipaw en attendant mon bus pour Mandalay, comme ci je n'avais pas encore assez marché !

Myanmar - Entre deux villages Palaung

J'ouvre un œil vers 6h du matin. Les animaux chantent déjà dans tout le village. A 6h15, ce sont les moins qui s'y mettent. Le père de famille vient peu après faire une prière devant un petit hôtel aménagé pour Bouddha. Nous avons le droit à un copieux petit déjeuner avant de démarrer notre marche.

James nous fait découvrir pleins de choses, un citronnier, un arbuste à thé, des arbres immenses, des feuilles de thé qui sèchent au soleil. Nous faisons une halte au bord d'une petite cascade. Luca boit plusieurs lampées. Il me dit qu'il est habitué à boire de l'eau un peu partout. Il a suffisamment voyagé en Asie pour savoir ce qu'il fait. Il est surpris : l'eau a un goût de citron ! Intrigué, j'en avale prudemment quelques gouttes au creux de ma main, préalablement nettoyée. Je ne sens pas de citron... après quelques secondes de réflexion, je me dis que c'est par sa main et la feuille de citronnier qu'elle a tenu qu'il sent ce goût !

Nous continuons notre marche. Encore d'agréables paysages et des visages très photogéniques, comme cette grand-mère, tranquillement assise au bord de la route avec une amie et fumant son cigare avec plaisir !

Les repas sont toujours aussi excellent. Par contre, Luca n'a pas très faim. Son ventre commence à le tirailler... conséquence de son imprudence du matin. Boire de l'eau dans la rivière, qui plus est dans sa main qui n'était pas propre. Le point positif, c'est que du coup, je peux manger sa part. Je mange comme un roi.

Chez nos hôtes du jour, j'essaye le fameux bétel. Je cale la préparation pâte + feuille sous ma molaire. En mastiquant la chose, des litres de salive m'emplissent la bouche. Je comprends pourquoi les amateurs de bétel crachent sans arrêt. Le goût, sans être désagréable, n'a rien de transcendant. Je dois plusieurs fois évacuer le surplus de salive .L'intérieur de ma bouche est complètement rouge. Au moins, j'aurais essayé !

Dans le village, toujours des enfants. Ils jouent avec de petites roues qu'ils font rouler en courant. J'essaye également mais n'y arrive pas ! Pendant ce temps, les femmes vont chercher de l'eau au puits en haut du village. Il y a quelques panneaux solaires mais toujours pas d'eau courante.

Je jette un coup d’œil au ciel étoilé avant de m'assoupir.

Myanmar - Dans les montagnes autour de Hsipaw

Je retrouve mon guide pour ces 3 jours de trek. Il s'appelle James et a 19 ans. Métisse, sa maman est d'origine shan et son père est chinois. Les shans peuplent la région et les chinois sont tellement proches qu'ils sont bien mélangés aux shans. En plus de ma personne, le groupe est composé d'un couple italo-thaï. Luca est originaire du lac de Côme et vit en Asie depuis plusieurs années. Bum étudie l'agronomie dans une ville proche de Bangkok. Ils se sont rencontré sur une plage de Koh Samui.

Nous attaquons par un sentier au milieu de champs de pastèques. Elles sont destinées au marché chinois et exportées par convois ferroviaires. James nous explique ensuite la différence entre le bœuf shan et le bœuf chinois. Le shan, vous le voyez sur la photo à droite. Il traîne une charrette, tire une charrue et broute de l'herbe. Le chinois, il marche à l'essence : c'est un motoculteur !

En fait, cette marche est un retour dans le temps. Je me retrouve au temps de mes grands-parents, ou peut-être de mes arrière-grands-parents. C'est une société rurale qui compose les paysages que je découvre. Les habitants travaillent aux champs. Leur charrues sont en bois, tractées par l'animal. Les villages sont constitués de huttes sommaires mais proprement construites. Alors bien sûr, ce n'est pas le confort moderne, mais j'ai le sentiment de vies heureuses.

Cela change. Je ne parle pas du côté heureux, ce n'est pas à moi d'en juger surtout en si peu de temps, mais du décalage temporel. La mécanisation fait son petit bonhomme chemin. Quelques motoculteurs apparaissent. Des bulldozers, chinois également, tracent des pistes de terre entre les villages.


Nous passons à côté d'un arbre centenaire, les racines à l'air. Il est tombé il y a peu. Le prix à payer pour la modernité ? La piste aurait pu être décalée d'une dizaine de mètres sans toucher à ce vestige naturel. Lorsque je demande à James ce qu'il en pense, il se dit que oui, c'est bien qu'une route permette de rejoindre les villages, mais c'est dommage que l'arbre finisse en bois de chauffage !

Nous faisons une première pause à la cabane de trois paysans. James découpe la papaye qu'il a ramassé quelques minutes plus tôt, un délice. Quelques cartes postales sont accrochées sur une des poutres de la cabane, Londres, Toulouse... je me demande comment elles sont arrivées là et je regrette de ne pas en avoir apportée une de Bretagne ! Ils nous proposent de picorer quelques morceaux de viande de porc, arrosés d'un fond de whisky de riz. A 10h du matin, je préfère la papaye.

Tout au long de la journée, James met de la musique sur son smartphone. Les derniers tubes occidentaux mais aussi les version parodiées en birman ou chinois. Il nous explique aussi que les shans sont proches des thaïs : "Shan is the sister, Thaï is the brother". Le soir, nous passons dans la région palaung. Les shans peuplent les bords de la rivière, les palaungs les montagnes de la région. J'apprends à dire bonjour, en shan : mishumka, et en palaung : jamsa !

Le soir, nous logeons chez l'habitant dans un village palaung. Avant que la nuit ne tombe, nous déambulons dans les rues du village. Les enfants sont curieux et nous passons plus d'une heure à jouer avec eux, à prendre des photos. Un des meilleurs moments du voyage, dans ce village authentique.

Nous rentrons chez nos hôtes. Le repas est exquis. Nous dormons à l'étage, les enfants de la maisonnée sont enfuis sous leurs couvertures de l'autre côté de la pièce. Une petite partie de cartes et nous nous enfouissons sous les épaisses couvertures à notre tour.

Myanmar - Train vers Hsipaw

Réveil à 2h45 ! Je dois réveiller le réceptionniste pour qu'il m'ouvre la porte et je pars à pied dans les rues désertes de la ville pour rejoindre la gare. Désolé pour le mototaxi qui monte la garde en cas d'éventuel touriste... c'était moi, mais je ne suis pas client.

Je trouve le train au quai n°4. La voiture de première classe est pleine de touristes. Les sièges sont plutôt confortables. Je précise que la première coûte 4 dollars contre 1,3 dollars pour la classe éco. Une femme vend du riz et des beignets frits sur le quai, ouf, cela rattrape le petit déj que je n'ai pas pu prendre à l'hôtel.

Le train joue au trampoline en se brinquebalant sur les rails. Des branches lèchent les vitres. La campagne défile. A midi, nous passons le viaduc de Gokteik, qui enjambe la gorge du même nom. La bête mesure 688 m de long pour 97 m de haut. Une sommité en 1901, année de sa construction. Nouvelle précision : nous avons parcouru 115 km en 8h, soit moins de 15 km/h de moyenne !

Nous entrons ensuite dans un tunnel avant que les champs ne réapparaissent. Mes yeux se baladent sur les rizières asséchées, les plants de canne à sucre, les paysans sous leur chapeau conique, les tracteurs d'un autre âge. Puis Hsipaw.

J'attrape mon sac et pars dard-dard dans la ville pour trouver un lit pour la nuit. J'ai entendu parler de Mr Kid. Pas de problème, il y a une chambre libre. Spartiate, mais pour 5 dollars, c'est parfait !

Je me renseigne ensuite sur les randos dans la région. Je pense d'abord m'aventurer tout seul et rallier la ville de Namhsan... mais la zone est redevenue interdite aux étrangers à cause d'une rébellion. Ok, on va éviter. J'opte pour un guide, rendez-vous demain à 8h. Je vais me coucher à... 20h30 !

Myanmar - Sur la route de Mandalay

Joyeux Noël ! Je me réveille sur l'autoroute. Le soleil se lève sur ma droite. La région me semble plus aride, moins peuplée. La nouvelle capitale, Naypitaw, n'est pas loin. Je ne visiterai pas cette ville un peu fantôme, aux avenues un peu désertes. Les dirigeants birmans ont décidé, sur les conseils de leurs astrologues, de fonder une nouvelle cité et d'y établir la capitale du pays. Cela a coûté un bras, voire un peu plus.

Je tope un mototaxi pour rejoindre le centre-ville depuis la gare routière. L'auberge où je pensais rester est déjà pleine. Je réserve tout de même 2 nuits pour 4 personnes en prévision de l'arrivée de mes compères dans quelques jours.

Je finis dans un hôtel à 50 m de là. Une bonne douche et je commence à arpenter la ville. Le trafic est oppressant. A chaque instant, des hordes de scooters et de mobylettes se lancent à l'assaut des carrefours. Il n'y a que quelques vélos et un peu de voitures mais aucun feux de circulation... imaginez le bazar. Lorsque quelqu'un veut traverser un carrefour, il faut attendre que le flux perpendiculaire se calme. Une deuxième solution consiste à se jeter en travers et forcer le passage. La technique fonctionne mieux lorsque plusieurs personnes se lancent en même temps. Tout un sport.

Je trouve un restaurant proposant un buffet shan pour déjeuner. Puis je loue un vélo : objectif Amapura et le pont U Bein. Je longe l'Ayeyarwady. C'est sale. Je respire de la crasse. La route est une vaste piste de poussière. Je trouve à peu près ma place entre les scooters, les charrettes et les camions.

Après une halte dans un atelier de soie, j'arrive au lac. Il s'y trouve donc le pont U Bein, le plus long en teck du monde : 1,2 km. Une des principales attractions touristiques du pays, et l'une des plus photogéniques.

Je traverse le pont avec mon vélo et je m'installe sur l'autre rive. Petit dilemme, je veux rester jusqu'au coucher du soleil mais j'aimerais rentrer en ville avant la tombée de la nuit...

Quelques jeunes jouent au foot. Un homme s'approche. Il me parle mais je ne comprends rien. Il ne parle pas anglais. Nous discutons par gestes :
- Tu es venu à vélo.
- Oui et il fait chaud !
- C'est bien. Mais tu ne conduis pas ? (ou il y a beaucoup de circulation... en tout cas il mime quelqu'un au volant).
- A vélo, je slalome entre les camions.
- Ta montre n'a pas d'aiguilles !
- Non, mais elle donne la même heure que la tienne.
- Ça va. C'est bien.
- Je peux te prendre en photo.
- Non. Après une pause, il me propose une cigarette.
- Non merci, entre la poussière et la pollution, je tousse déjà assez sur le vélo !

Des enfants s'approchent. Ils s'échangent quelques mots et l'homme s'en va. Un des gamins me demande "what your name ?". Je lui réponds, lui s'appelle Mimiano... ou quelque chose qui y ressemble !

Le soleil baisse. Je prends quelques photos qui me font penser que j'ai bien fait de rester. Je me rends compte que cela sera encore mieux de l'autre côté du pont pour avoir le soleil derrière lui. Là, le point de vue me donne un magnifique ciel orangé. C'est ce que je voulais. Le pont dessine une ombre qui tranche avec l'arrière-plan.

Malheureusement, mécaniquement, la nuit approche. J'enfourche la bécane et je fonce vers la ville à plus de 10 km. En longeant le côté nord du lac, je fais quelques dernières photos à la volée entre les motards.

Le nuit est déjà là quand j'arrive à l'entrée de la ville. Je frôle un break, ou plutôt il me frôle. Je me retrouve dans le quadrillage des rues. Pas faciles de se repérer dans la nuit. J'attends que d'autres fendent le trafic pour pouvoir traverser chaque croisement. Un scooter se ramasse. Il ne suit pas les règles ! Heureusement, l'homme se relève sonné mais sans mal.

Je retrouve mon hôtel. Après un plat de nouilles, je me pose dans la salle de restauration de l'auberge pour recharger la batterie de mon appareil photo et écrire un peu. Un des jeunes qui travaillent dans l'hôtel a envie de discuter un peu. Lui et ses collègues parlent un peu anglais. Il m'apprend quelques mots en birman et à compter jusqu'à 10. Après quelques sujets bateau et quelques rigolades avec ses copains dont je n'ai pas toujours compris l'origine, il me demande combien je gagne... ouh là, sujet glissant. Je comprends qu'il gagne 10 000 kyats par semaine (8,6 €). Je vais me coucher !

Myanmar - Mont Zwegabin

Je ne rate pas le petit déjeuner sur la terrasse, pas comme la veille quand je ne savais pas qu'il était inclus dans la chambrée... J'embarque deux litres d'eau et un vélo, direction le mont Zwegabin, à une dizaine de kilomètres de là. Je demande mon chemin : "tout droit". Pas compliqué.

Je croise des forçats sur le bord de la route. Pour élargir la route, ils remuent du goudron avec un simple bâton et cassent des cailloux à la masse. Hommes et femmes confondus.

J'arrive au pied du mont. Quelques marches à monter pour atteindre le sommet. Évidemment, je les compte : 4300... à peu près ! Sur le chemin, je croise plusieurs groupes d'enfants. Ils sont accompagnés de leur instituteur/institutrice, c'est leur sortie scolaire.

Là-haut, à 723 mètres d'altitude, la vue est parfaite sur toute la région. Les enfants s'amusent. Et moi avec. Ils lancent des avions en papier dans les airs remontant la pente. J'essaye aussi. Mon avion tient plusieurs minutes. Je m'éclate !

Après avoir fait le tour du monastère, je me pose sur un banc pour écrire un peu et profiter du soleil. Plusieurs enfants en profitent pour me demander de faire une photo avec moi. Ils sont super gentils. Plusieurs d'entre eux me demandent si j'aime leur pays : bien sûr ! Et un me demande même : "are you happy ?". Comment je pourrais ne pas être heureux, prenant un bain de soleil sur mon perchoir !

Je reste une heure ou deux, puis la faim m'assaillant, je mange au monastère. Pour 2 dollars, j'ai le droit à un énorme repas végétarien. J'ai tellement de nourriture que je dois me forcer pour tout finir. Mais je me régale.

Quand je descends, d'autres enfants continuent à monter. Une petite fille, exténuée, reprend son souffle. Je lui propose un peu d'eau. Elle me fait oui de la tête et ne prend qu'une petite gorgée. Courage, plus que quelques dizaines de marches !

Les singes sont encore présents et prennent volontiers la pose. Les enfants leur jettent des bonbons. Le retour est plus rapide. Je retrouve mon vélo. Lorsque je reviens vers Hpa-An, les travailleurs de la route sont toujours là. Je leur propose un peu d'eau également. C'est bon merci, ils en ont déjà.

Ce soir, c'est le réveillon de Noël, j'avais presque oublié. J'ai juste le temps de trinquer avec un peu de vin australien offert par un couple de tourdumondistes hollandais et le couple de français croisé deux jours plus tôt à la gare routière. Je termine le réveillon dans mon bus, sur la route de Mandalay.