Jour 113 - Leon


On se réveille avec la lumière du jour. Les employés d'une gargote à côté s'activent. Nous y prenons notre petit déjeuner, face à l'océan. Du gallo pinto: riz et haricots, œuf, fromage et pain grillé! Ensuite, nous longeons la plage à pied. Le ciel est gris malheureusement, mais la plage est énorme. Nous retournons au van et prenons le chemin de Las Peñitas, une autre plage pas loin.

Là, on se pose sur la plage et le soleil tape fort maintenant, même à travers les quelques nuages. Nous mangeons à proximité, 140 cordobas pour 7 crevettes, cela fait cher la crevette. On se sent un peu pigeonné mais bon. Du coup, on profite de notre table pour jouer aux cartes! Un petit bonhomme en haillons en profite pour venir réclamer la fin du pepsi de Maïlys. Il ne parle pas mais émet des petits couinements. Il a l'air bizarre. Il prend le pepsi et dépose une pièce à la place... il fait trois pas et revient récupérer sa pièce! Pas banal comme technique... mais il repart avec le pepsi et la pièce!

Nous partons ensuite pour Leon et on y trouve une auberge sympa. Un petit tour dans la ville nous fait découvrir une boulangerie française. Allez, on se laisse tenter. C'est une hollandaise au service, les viennoiseries sont mauvaises. Il n'y a de français que le nom.

A la tombée de la nuit, on veut déplacer le van pour le garer au plus près de l'auberge. Je me rends compte que la lumière du tableau de bord ne s'allume plus! Décidemment. Bon, rien de bien grave, on trouve une place dans la rue de l'auberge, c'est le plus important. Place à la nuit. Et nous retrouvons encore deux compères à l'auberge: Gustavo le brésilien et Mischa l'allemand.

Jour 112 - Rebelote

Debout à 7h, je repars à la recherche d'un serrurier. Après plusieurs allers-retours sous une forte pluie dans les ruelles de Granada, avec un détour par le marché crasseux, je trouve finalement un serrurier qui pense avoir le bon modèle. Il me fait un double pour 60 cordobas et je reviens à l'auberge. Je fais le test : la clé ne marche pas.

Tant pis, après avoir pris un petit déjeuner, nous décidons de partir tout de même sans double de clé, il nous en reste une quand même. On repasse vite fait chez le serrurier, explique que sa clé ne marche pas et il nous rembourse. En route pour Managua.

Nous passons par le volcan Masaya, un des plus actifs du pays. Depuis l'entrée du parc, un sentier de 6 km entre d'anciennes coulées de lave nous guide jusqu'au cratère. Nous voyons l'intérieur de celui-ci, enfin ce que la fumée très présente veut bien nous laisser voir. Nous ne restons pas très longtemps à cause des émanations de souffre, donnant une odeur d’œufs pourris me rappelant les geysers boliviens.

Un garde nous informe qu'il y a un autre cratère à aller voir, à quelques minutes à pied. Nous y allons, traversant un paysage désolé de terre brûlée.

Au bord de ce nouveau cratère, nous croisons un autre garde. Il se doit s'ennuyer un peu à faire ses rondes tout seul sous le crachin nicaraguayen, avec peu de touristes à rencontrer. Il taxe une cigarette à Maïlys, puis nous explique que les pluies acides perturbent la végétation locale. Les feuilles des rares arbustes sont rouges.

La végétation a tout de même pris possession de ce cratère qui est éteint aujourd'hui. A l'origine, il y avait un énorme volcan s'étalant sur 54 km², qui après une éruption a dû s'effondrer. Il en reste surtout les balafres du paysage et le cratère encore actif. Un petit musée explique l'histoire du site à l'entrée du parc, ainsi que des descriptions des types de volcans à travers le monde. Petite visite sympathique.

Nous repartons en direction de Managua, la capitale du pays. Nous ne souhaitons pas visiter cette ville, puisqu'il paraît qu'elle n'offre aucun intérêt. Nous faisons tout de même une pause dans un fameux fast-food aux abords de la ville.

Notre objectif du jour est d'atteindre Leon, une autre ville coloniale au Nord du pays. Le problème est qu'il n'y a aucun panneau pour indiquer la bonne direction. On commence à tourner en rond alors on demande à un autochtone sur le bord de la route. Il nous demande si on veut la carretera vieja ou nova (la vieille ou la nouvelle route). Peut importe pensons-nous ! Quitte à choisir, on lui demande la nouvelle. On ne comprend pas bien ses explications pas claires et à rallonge... il nous parle plusieurs fois d'aller jusqu'au "top"... on comprendra quelques jours plus tard qu'il voulait dire le "stop".

Nous le remercions et tentons notre chance avec les bribes d'infos que nous avons capté. Surtout Maïlys qui est celle qui se débrouille le mieux en espagnol. Nous tombons finalement sur la route pour Leon, elle est correcte mais sans plus, on ne sait même pas si c'est la nouvelle ou l'ancienne!

La route, correcte au début, devient de plus en plus abimée au fur et à mesure des kilomètres. Les nids-de-poule, plus nombreux, sont aussi plus gros : nous sommes donc sur l'ancienne route (enfin j'espère !). Pour parfaire le tableau, la fine pluie est devenue battante, et le soleil se fait la malle.

Je fais maintenant du slalom entre les trous dans la route (on ne peut plus parler de nids-de-poule à ce niveau là). De temps en temps: "bam", le choc, j'en rate un, et je suis content de conduire un gros van costaud. La route s'alterne entre la campagne et des petits villages isolés. La pluie a transformé la route en champ de boue, et je ne dépasse plus les 30 km/h. Je n'ai pas vraiment la notion du temps, mais nous n'avons parcouru que quelques dizaines de kilomètres (40?) en 1h30 après avoir laissé Managua... et là...

Stupeur. La route est barrée. On dirait qu'il y a moyen de contourner par le côté... mais cela semble précaire vu la boue. Au bout de nos phares, je réalise qu'il y a des ouvriers, il est environ 18h, ils quittent leur chantier. L'un deux passe près du van, je l'interpelle : il me dit qu'il n'y a plus de pont, qu'il est tombé pendant une crue, qu'il n'est pas possible de passer par là... et que pour aller à Leon, il faut reprendre l'autre route à... Managua !

La poisse. La mort dans l'âme, j'entame le demi-tour jusqu'à la capitale. On s'arrête demander dans une des quelques échoppes bordant la route. Il paraît qu'il y une route à 4km qui permettrait de retrouver la nouvelle route sans retourner jusqu'à Managua, mais les indications sont toujours aussi vagues. Nous redemandons une autre fois, cette fois-ci la route serait à plus de 10 km... tant pis, nous nous résignons à rejoindre Managua.

Et c'est parti pour re-slalomer. Il pleut toujours à seau. Je passe carrément sur la gauche de la route (si on peut appeler cela une route) pour éviter un énorme trou, mais je m'en prends un autre: "bam". Et là, le van s'arrête. Il a calé. Aïe. Je tente de redémarrer. En vain. Une légère odeur de cramé se fait sentir. Nous sommes officiellement en rade. Quelques véhicules passent et nous engueulent "t'es garé sur la route!". Et tu crois que cela me fait plaisir ?!?

La première chose à faire est de dégager de la route. Yann et Maïlys descendent pour pousser. Je fais de même, plaf, pieds dans une flaque, et nous poussons le van sur le côté. Nous sommes devant un garage ! Yann et Maïlys vont voir, mais il est fermé. Cela pourra toujours aider si on doit passer la nuit là... mais je n'ai aucune envie de passer la nuit là !

Je me rappelle la réparation de la veille. En fait, la cause de la panne n'a pas été réparée... mais je me souviens du fusible. Par chance, Sylvain m'avait dit qu'il nous laissait quelques fusibles pour les phares, "au cas où". Je les retrouve. J'ouvre le capot du moteur par l'intérieur (le moteur est accessible depuis l'habitacle dans les van Chevrolet...). J'accède à la bobine et retire le fusible installé la veille. Effectivement, il a grillé. J'en trouve un autre et le place. Je rappelle mes deux acolytes pour qu'ils rentrent dans le van : si cela démarre, je ne m'arrête plus avant Leon de peur que le van recale !

Une fois tous les 3 à bords, je demande à tout le monde de croiser les doigts. Je tourne la clé... et cela redémarre ! YEEEAAAAAH ! Cap sur Managua.

Une fois revenus sur nos pas, on demande une nouvelle fois notre chemin, à une station service ce coup là. 4ème feu à gauche, ok, nous voilà sur la nouvelle route pour Leon. On peut souffler un peu, la route est bien asphaltée, rien à voir avec le bouillon de l'autre. Je trace jusqu'à Leon, on décide d'aller dans une petite ville non loin, Poneloya, sur la côte Pacifique.

Nous trouvons un petit coin calme pour garer le van. J'ai conduis toute la journée, stress et fatigue tout au long de cette épopée qui n'en finissait plus. La nuit de sommeil est bien méritée, nous allons dormir dans le van.

Jour 111 - Les pigeons voyageurs à Granada

A 8h, j'attends Armario qui arrive avec l'électricien. Celui-ci fait quelques tests, regarde les fusibles et essaie de démarrer : grosse fumée et odeur de brûlé à nouveau. Hum. Il désigne la bobine de démarrage, c'est elle qui a cramé. Je lui demande des explications : cette bobine sert à envoyer du courant au moteur notamment pour démarrer. Pour une raison inconnue, elle devait envoyer trop de courant et cela a dû grillé. Bilan : il faut la changer.

Les mécanos repartent se renseigner au garage puis rappellent : la pièce n'est pas disponible à Granada, mais à la capitale Managua... pour 4500 cordobas, la monnaie locale. Le gars peut aller la chercher en scooter... il faut donc ajouter 600 cordobas pour le déplacement et la main d'oeuvre. Je négocie le tout pour 5000 cordobas : cela fait tout de même plus de 220 dollars. Cela fait un peu mal... non, cela fait vraiment mal, quand on pense que le van nous en a coûté que 500.

Je pars au plus vite sous la pluie au distributeur le plus proche afin de retirer une énorme liasse de billets, et revient avec 4500 cordobas pour le mécano qui part pour Managua en scooter à 45 kilomètres.

Pendant ce temps, nous partons nous promener dans la ville alors que la pluie s'est arrêtée. Des gamins jouent au basket ou au base-ball. Un petit tour par un cyber-café, nous tentons de poster des annonces de vente sur les sites Internet mexicains, afin de trouver un repreneur pour le van : j'ai déjà hâte d'y être ! Je commence à me dire qu'il faudrait rouler jusqu'au Mexique sans s'arrêter pour vendre ce van au plus vite...

On retourne à l'auberge. Armario est déjà là, il me montre la bobine B-6, pour 6 cylindres. Il en a trouvé une pour 3600 cordobas, au lieu de 4500. C'est toujours ça. L'électricien arrive peu après (je ne sais plus son nom!). Il installe la bobine. Un coup de démarreur et... le moteur démarre ! Ouf. J'en profite pour demander à Armario de régler le ralenti du moteur qui cale trop facilement. Pendant ce temps, l'électricien m'explique qu'il a installé un fusible entre la nouvelle bobine et le moteur, comme cela, s'il y a encore une surtension, le fusible sautera et non la bobine. Bonne idée pensais-je ! Merci ! Je me dis quand même que, normalement, il n'y a pas de raison qu'il y ait une nouvelle panne... m'enfin.

Il me demande jusqu'où on va avec ce van. Je lui décris le voyage jusqu'au Mexique puis les USA. Il me répond qu'il a déjà été au Mexique... "pour les vacances?" dis-je bêtement... non, il voulait passer aux USA clandestinement. Cela a été très dur, il ne le referai jamais, il a passé 3 jours sans rien manger, sans se laver. Tout ça pour se faire attraper à Mexico et se faire renvoyer à la maison.

Je les remercie puis pars à la recherche d'un serrurier pour faire un double de la clé. Mais je ne trouve rien. La nuit tombe, je rentre à l'auberge. Yann fait un ping pong avec Maïlys et... Gustavo ! Notre ami brésilien vient d'arriver dans la même auberge que nous. L'histoire se répète.