Congo - Ouesso

La poussière et la chaleur sont là. La terre est latéritique, nous avons bien approché la deuxième forêt de la planète. Mes pieds en tongs vont progressivement se couvrir de cette terre rouge, j'aime bien, je me sens en vacances. On se trouve une omelette à avaler, avec des haricots pour bien se caler le ventre de bon matin. Un verre de chocolat chaud aide à digérer le tout (1100 CFA). Puis nous trouvons notre petite auberge où nous passerons une nuit (10 000 CFA = 15 €). Les employés sont serviables, à grand renfort de "monsieur", ils m'ajoutent un ventilateur dans ma chambre. Matondo !

Nous nous baladons ensuite au bord de la rivière Sangha. Les autochtones s'entassent dans des pirogues qui risquent de verser à chaque instant. Un militaire vient à notre rencontre. Il veut faire une photo avec "la fille". Ok. Après il voudrait qu'on lui donne... bien sûr mec... Adrien lui demande son nom : Franck ? Ok, on te l'amènera, demain ou un autre jour...

Nous remontons vers le "port de commerce". Le Cameroun n'est qu'à 75 kilomètres en remontant le courant. Des pirogues chargées de banane sont rapatriées. Je me demande pourquoi les bananes poussent mieux au Cameroun. En tout cas, le port a triste mine. Il doit regretter le départ des derniers exploitants français qui l'ont laissé en plan.

Il y a sûrement plein de choses à dire sur la colonisation... mais au moins une partie des congolais regrettent sûrement le temps où les français s'occupaient du pays. Adrien repense à une histoire. Un jour, il sonde un chauffeur de taxi :
- C'est bientôt les élections.
- Oui, c'est bien, on en a marre de celui-là, en faisant référence à Denis Sassou Nguesso.
- Ok, vous allez mettre qui à la place alors ?
- Je ne sais pas, mais les français ils ont un plan.
- Euh, non, ce n'est pas à la France de s'occuper de ça. C'est les congolais qui vont décider, répond Adrien.
- Non pas la peine, je suis sûr que François Hollande a un plan.

Nous remontons ensuite vers le centre du village. Le marché avec ses étals serrés et encombrés propose du manioc et des carcasses de singe entre autres. La chaleur est étouffante. Mes compères sont en nage. Nous passons par l'église, un grand hangar avec un toit en tôle. Il y fait un peu plus "frais". Après s'être fait appeler de "niho" par un enfant, c'est-à-dire qu'il nous a confondu avec des chinois (niho dérivant de nihao = bonjour en chinois), nous choisissons de boire une N'Gok dans un troquet local. De toute façon, il n'y a pas de soda.

Nous croisons ensuite des enfants dansant et jouant de la musique. Il paraît qu'ils préparent une fête. Adrien demande à une femme non loin s'il peut les prendre en photo. Elle lui répond que non... mais en insistant, cela passe. Certains ont peur que leur esprit soit capturé par l'appareil.

Un orage éclate. C'est le déluge. Le soir, la pluie continue mais nous nous rendons à un restaurant pour manger du crocodile, sur les conseils des employés de l'auberge. Sur place, seules deux tables sont occupées, chacune par un français accompagné d'un congolais. Des français "fatigués" par l'Afrique, comme le dit Adrien : "trop de bières, trop de petites". Ils sont contents de croiser de nouvelles têtes de mundelés, où surtout de mundelette.

Un rat parcourt la charpente. Il n'y a pas de crocodile, alors on va goûter la tortue et le porc-épic. Le premier n'est vraiment pas bon, avec de morceaux sans beaucoup de viande, le deuxième s'avale un peu mieux, il y a un fort goût de gibier. Je me rabats sur le riz et les légumes. Oumpf ! Ce n'est pas un légume que j'ai avalé, mais un piment entier ! La faible luminosité ambiante m'a feinté. La moitié de mon visage est en pleurs pendant un quart d'heure, au grand plaisir de mes acolytes.

Avant de s'endormir, on découvre un VIP : les discothèques locales. Tout le monde a sa bière en gardant la capsule sur le goulot pour que les esprits n'y entrent pas. On teste la piste de danse ainsi que la théorie d'Adrien selon laquelle, si un mundelé danse, il faut moins de 60 secondes avant qu'une fille viennent se coller à lui. Théorie avérée, en revanche, rien ne présage de la qualité de la dentition de la demoiselle en question.