Vélotrip - Au Nord...

... ça caille ! La nuit fût plus que fraîche. Je me lève tôt après avoir mal dormi à cause du froid, pourtant j'ai dormi habillé. Il y a du givre sur les voitures !

Je pars directement à la plage où je prends mon petit déjeuner. Je n'ai jamais eu une terrasse aussi grande. Pour moi tout seul en plus.

Je longe ensuite la baie de Canche et slalome entre les résidences de la banlieue touquettoise. Me voilà ensuite à Etaples. La route continue en passant à côté d'un cimetière anglo-saxon de la Seconde Guerre Mondiale.

Boulogne, c'est tout droit. Mais un petit panneau indiquant "les éoliennes" attire on attention. J'ai le temps, j'ai les jambes, alors je bifurque. Petite montée en lacet, et me voilà sur les sommets locaux. La vue est superbe, au milieu des champs, avec la côte au loin. Les éoliennes sont bien là, dans mon dos.

Je me retrouve dans un petit village inconnu au bataillon. La place est déserte. J'hésite sur le chemin à prendre. Je tombe enfin sur un autochtone, une armoire à glace qui promène ses 2 chiens. Je lui demande la route pour Hardelot : "c'est loin !" me répond-il. Ce n'est pas la question, bon sang de bonsoir ! Il me répond de traverser le village. Quand je lui dis que j'ai failli partir de l'autre côté, il me répond que je peux y aller aussi... bon, je vais trouver ma route tout seul.

Je retombe sur des routes plus importantes. Je roule par monts et par vaux. A l'occasion d'un "vaux", je bats mon record de vitesse : 55 km/h ! Je file vers Hardelot. Ce dimanche matin, je croise pas mal de pistards sur les routes. En me dépassant, l'un d'eux me demande d'où je viens. "De Paris !", réponse : "Ah ouais ! Bien ! Bonne route !". Un panneau m'indique Boulogne à 11 km.

Je bifurque vers Hardelot et m'ajoute quelques bornes, je retrouve ensuite la côte et arrive à Outreau, un nom de tragédie. Je traverse la ville et m'y voilà : BOULOGNE-sur-MER !

Il n'est que 11h30. Malgré les détours, je suis encore en avance sur mon planning. Je pousse jusqu'au port de commerce. Un endroit bien désert, en tout cas le dimanche matin. Les portiques sont à l'arrêt.

Je parcours la digue à vélo. Il y a quelques pêcheurs qui tâtent le poisson pendant que madame tient compagnie à monsieur. L'art de vivre à la nordiste quoi.

Je rejoins le centre-ville. Pas grand-chose d'exceptionnel. Je jette tout de même un coup d’œil au Centre National de la Mer, alias Nausicaá : il abrite notamment un aquarium et des otaries et, avec 600 000 visiteurs par an, est un des principaux sites touristiques du nord du pays.

En front de mer, il y a également la statue équestre de San Martin, personnage de l'histoire sud-américaine, duquel je vous ai parlé il y a quatre ans. Le héros est décédé à Boulogne en 1850 en soufflant ces derniers mots à sa fille : "Mercedes, esta es la fatigua de la muerte !". Sa statue a résisté aux bombardements de la Seconde Guerre, ce qui reste un miracle pour les boulonnais.

Je monte encore quelques côtes aux abords de la ville. La friterie à Dédé attire mon attention, mais je n'irai pas saccager ma performance sportive en avalant un litre d'huile à l'arrivée. Je suis bien dans le Nord. Je me dirige tranquillement vers la gare. L'heure de faire le bilan : 500 km en 3 jours et demi !

Un train part pour Paris dans 30 minutes, timing parfait. Il ne reste que des premières classes, tant pis. Il y a un compartiment vélo dans le TER, tant mieux. Du coup, je vais quand même m'assoir en seconde classe, tant pis !

Deux homme m'aident à monter mon vélo. Le premier est venu rendre visite au second à vélo, et repart en train. Un peu comme moi mais il a fait moins de kilomètres tout de même, environ 70, mais avec un vieux VTT. On discute de nos périples respectifs.

Le train file vers la capitale. En quelques instants, il défait tous mes efforts pour arriver jusqu'au Nord-Pas-de-Calais. Un sorte de force de gravité qui te ramène au point de départ. A peine le temps de somnoler, voilà la Gare du Nord. Il faut se faufiler entre les parisiens, voitures sur les avenues, vélibs sur les pistes cyclables. Pas d'espace, du bruit, de la pollution... c'était mieux en campagne !

A 18h, je suis à Montreuil. Fin de l'aventure après avoir briqué le bolide et pris une bonne douche. Fier de mes derniers jours : un défi physique et mental. Des paysages, de l'aventure, de la débrouillardise... la liberté ! Vivement le prochain.

Vélotrip - Emmenez-moi

Alors que je replie mon paquetage, un couple émerge de son camping car non loin. Le mari sort, main gauche dans la poche, papier toilette dans la main droite et me lance : "pas trop froid la nuit ?" Pas trop, c'est plutôt le vent que je crains aujourd'hui ! Je quitte le camping tranquillement. L'accueil est toujours fermé...

A moi le bitume. Des champs, une centrale nucléaire et encore des champs. Les jambes tournent bien. Par contre, le vent souffle sans modération, et dans le mauvais sens. A Biville-sur-Mer, c'est la rubrique des chats écrasés : un rat et un hérisson sont éclatés sur la route.

A Criel-sur-Mer, je redescends des falaises vers la plage. Mais ensuite, il faut regrimper en haut de la falaise ! Et cela grimpe bien. Un autochtone taillant sa haie au bord de la route me voit en train de tirer sur mon guidon et m'encourage ! Voilà ensuite Le Tréport.

Je longe plus ou moins la côte. Dans un village, ma route croise... des lamas ! C'est assez inhabituel pour que je m'arrête et prenne une photo. Une voiture s'approche et se gare devant le portail de la maison, c'est la propriétaire. Nous échangeons quelques mots et elle m'explique qu'avec son mari, ils emmènent leurs lamas en rando (Pyrénées, Cévennes...) pour qu'ils portent leurs affaires. Stylé !

Je suis de retour en bord de mer. Mais c'est l'impasse. Je m'arrête à mi-falaise avant d'être revenu au niveau de la mer. Tiens, un petit chemin part sur la droite. Il n'est pas du tout adapté pour les vélos, encore moins quand ce n'est pas un VTT, encore moins avec 30 kilos de chargement. Je monte une première fois sans le vélo pour analyser le terrain : allez, je vais le tenter !

Je détache une partie de mon chargement, tente, eau et sac de couchage. Je monte le tout en deux temps. Faire grimper le vélo est un peu difficile. Une fois en haut, je fais un check à l'âne qui broute tranquillement dans son pré au sommet et je pars la fleur au fusil le long de la falaise. La vue est superbe.

Après quelques centaines de mètres, nouvelle difficulté. Grosse descente sur un terrain accidenté, pas évident, je manque de peu de laisser dégringoler ma bécane à plusieurs reprises. Et après, il faut remonter, en deux temps toujours. Nouveau dépaquetage. Mais en haut, il y a une barrière d'au moins 1m50 de haut. Coup de bol, un couple de promeneur arrive au bon moment et me propose gentiment un coup de main, que j'accepte volontiers !

Je suis encore dans des champs au bord de la falaise. Une nouvelle barrière. Aïe aïe aïe. Là, personne ne vient à mon secours. Je déballe mes affaires une nouvelle fois et monte mes affaires. Évidemment, la barrière, non seulement est aussi haute que la précédente, mais il faut en plus qu'elle soit au bord d'une pente, ce qui me place en contrebas pour passer mon vélo. J'hésite à détacher les sacoches en plus et puis non. Je galère bien à monter le vélo et ses plus de 20 kilos par dessus, manque d'abîmer la protection du pédalier, un ultime effort et je le dépose finalement de l'autre côté à bout de bras aussi délicatement que possible. Je suis passé ! Il m'a fallu 1 heure pour faire 1 km, mais pour la vue et le défi, cela valait le coup !

Je continue ensuite vers la Baie de Somme. Tout devient plus plat. Pause déjeuner à Cayeux-sur-Mer. J'emprunte les nombreuses pistes cyclables pour faire le tour de la baie. Le train touristique de la baie beugle à tue-tête... il circule en parallèle de ma piste cyclable. Il roule à 25 km/h... en poussant un peu j'arrive à le semer ! J'ai même le temps de faire une photo !

La piste est de plus en plus remplie de cyclistes du dimanche, venus se promener ce samedi de mai dorénavant ensoleillé. Mais celle-ci s'arrête. Je me retrouve sur des petites routes à suivre des balises de je-ne-sais-quel parcours. Mes coup de poker m'éloignent de la côte et je me retrouve en direction de... Montreuil ! Mais pas mon Montreuil du 93, je vous rassure. J'entre dans le Nord-Pas-de-Calais.

L'étape suivante est de rejoindre la station balnéaire de Berck. Une dernière piste cyclable de 4 km avalée à fond les ballons me ramène les embruns. Je ne m'éternise pas et continue vers le fameux Touquet-Paris-Plage.

Il me faut trouver mon havre de paix pour la nuit. Bien content de mon coup du camping de la veille, je veux retenter le coup. Par contre, le Touquet, c'est un autre standing. Pas évident de trouver un camping...

En voilà enfin un. Le seul de la ville on dirait. Mais il est encore un peu tôt, alors je vais attendre la tombée de la nuit en dînant sur la plage. Alors que je déguste mon sandwich rosette, un homme me demande d'où je viens : de Paris !

Mon interlocuteur est impressionné, et moi ravi de mon effet, le premier depuis le début du périple ! "Quand j'ai vu le vélo, je me suis dit que c'était un monsieur qui venait de loin". Nous discutons quelques minutes, du vélo, du Touquet, de Montreuil (celui du 93 cette fois-ci) qu'il a connu dans son ancienne vie de syndicaliste. Son fils, qui jouait au foot sur la plage, nous rejoint. Lui aussi est épaté, mais surtout, il a faim ! Ils partent manger, mais pas au fast-food, au grand dam de l'adolescent.

La nuit s'approche. Je retourne au camping. L'accueil est fermé, mais je regarde quand même le prix pour une tente... sauf qu'il n'y en a pas : il n'y a que des mobile-homes. Tant pis. J'entre tout de même et va dans un des coins du camping, à la recherche d'un terrain avec un mobile-home inoccupé. Je trouve mon bonheur. Je croise les doigts pour que personne ne débarque après coup.

La nuit est tombée, je vais prendre ma douche. Je me couche ensuite vers 22h. A peine je ferme les yeux, j'entends une voiture qui se gare juste à côté... zut !

Fausse alerte, c'est pour le terrain d'à côté. Je m'endors d'une oreille dans la fraicheur nordiste.