MAM

Lundi dernier, j'ai eu l'occasion de voir Michèle Alliot-Marie, ministre des Relations Extérieures! Elle était en visite à São Paulo et est venue rencontrer les chercheurs de l'université, travaillant en lien avec des laboratoires ou universités françaises. Tous les élèves français étaient donc invités.

Quelques chercheurs ont exposé brièvement leurs travaux, puis MAM a fait un petit discours assez bateau. Ensuite, ceux qui le souhaitaient pouvaient lui poser des questions... mais pas le droit de lui demander si ses vacances tunisiennes s'étaient bien passé...

D'ailleurs, elle n'est plus en poste une semaine plus tard. C'est maintenant Juppé qui prend les rênes du Quai d'Orsay. Elle aura tout de même bien profiter de sa dernière semaine au gouvernement: São Paulo le lundi, Brasilia le mardi, et le samedi au Koweit.

Flat Stanley

Je vous présente mon nouvel ami: voici Stanley


Il est venu frapper à ma porte vendredi matin, il veut voyager avec moi et découvrir le Brésil. Pas de problème lui ai-je répondu. Peut-être qu'il aura un peu trop chaud en pantalon, mais au moins il est bien étanche, c'est important.

En fait, c'est Emma (ma petite cousine pour les éventuels lecteurs qui ne sont pas de la famille!) qui participe, avec sa classe de CE2, à un programme international intitulé Flat Stanley. A l'origine, Flat Stanley est un livre racontant l'histoire de Stanley, qui s'aplatit afin de voyager plus facilement. Un jour, un enseignant d'une école primaire canadienne lit le livre et trouve l'idée intéressante. Il lance donc un mouvement suivit par de nombreuses écoles à travers le monde.

Les élèves de ces écoles réalisent des Stanleys, qu'ils envoient ensuite à d'autres écoles ou des connaissances dans d'autres coins du globe. La classe d'Emma a déjà envoyé des Stanleys dans une école de New York, une de Toronto et une à Auckland. Outre les Etats-Unis, le Canada et la Nouvelle-Zélande, des Stanleys de l'école Le Loch, à Auray, sont déjà partis découvrir l'Allemagne et... le Brésil!

Au boulot

Déjà un mois que les vacances sont finies. Et comme je n'avais pas encore repris les cours, j'ai pu aller travailler plein de temps au stage... yeeeeah. J'ai même passé un samedi entier à cartographier des lignes de bus de Brasilia sur informatique pour un projet à la bourre... re-yeeeeah.

Changement d'année, changement de projet. L'étude de trafic d'une autoroute de la région étant terminé, je suis donc passé à la licitation des lignes de bus inter-état de tous le Brésil, un gros projet réparti entre les lignes longues distances, courtes distances et les lignes entre l'état de Goias et Brasilia. Brasilia étant un cas spécial, puisque, à la manière de Washington DC, à la création de la ville, un district fédéral de plus de 5000 km² a été délimité à l'intérieur de l'état du Goias. Et comme l'aménagement urbain de Brasilia a été pensé de manière un peu utopiste, les logements à un endroit, les emplois à un autre, une foultitude de bus est nécessaire pour transporter tout le monde à l'heure de pointe. Mais comme la ville a grossi, de nombreuses villes satellites se sont développées pour loger tout le monde, dans l'état du Goias. Et là encore, il faut toute une armée de bus pour que chacun puisse parcourir les dizaines de kilomètres séparant emploi et logement.

Ce projet, commencé il y a maintenant plus d'un an (ce qui est assez long comparé aux projets réalisés dans l'entreprise en général), devraient bientôt prendre fin. Ensuite, c'est encore le mystère, peut-être je serais sur l'implantation d'un BRT à Manaus, ou une étude de transport à Buenos Aires... suspense. Avec un peu de chance, je pourrai peut-être voyager!

C'est la reprise

Sandra fait du zèle en restant une semaine de plus au Brésil. Alors il faut en profiter. A peine arrivés, les sacs encore sur le dos, nous passons par la Tour Banespa dans le centre de SP pour dominer la ville. J'avais averti de mon absence au travail pour le lundi, alors nous avons ensuite le temps d'aller tranquillement chez moi et de nous reposer.



Les deux jours suivant, je dois aller travailler. Sandra peut en profiter pour s'aventurer seule dans la jungle urbaine, un téléphone portable dans la poche en cas de soucis, mais il n'y en a pas eu. Elle a trouvé le magasin de tongs (en même temps, il y en a un peu partout) et a pu compléter sa liste de cadeaux.

Il ne faut pas oublier la piscine non plus, très importante, surtout au Brésil, surtout en été. Romain, un autre français en double diplôme et qui occupe l'autre chambre de la maison, en profite aussi. Cela lui permet de bronzer un peu, après être revenu tout blanc de ses vacances d'été passées en France.


Le mardi au stage, j'ai eu la bonne surprise d'apprendre que les séances de formation du jeudi et vendredi auxquelles je devais participer auront lieu la semaine suivante. Je peux donc finalement prendre congé et nous pouvons aller à la plage: direction Guarujá le jeudi. Nous nous baignons même si le ciel reste bien gris et que j'ai oublié mon maillot de bain... mais en fin d'après-midi, il commence à pleuvoir. Nous reprenons finalement le bus une heure plus tôt que prévu en début de soirée. La pluie: un acteur incontournable de l'été paulista.


Nous pataugeons de nouveau dans la piscine les jours suivants, quelques sorties et puis vient le dimanche. Sandra refait une nouvelle dernière fois son sac et je l'accompagne à l'aéroport. Presque 4h de transport en commun plus tard, je reviens chez moi sans ma petite sœur. Mon dernier semestre brésilien peut commencer.

Dernier jour ou presque

Il va falloir revenir à São Paulo. Alors on se la coule douce dans la piscine de l'auberge et on profite du soleil. Sandra en profite un peu trop d'ailleurs: un coup de soleil sur le nez, avec la trace des lunettes de soleil en prime!

A midi, nous voulons tester la viande argentine, si réputée. La veille, un restaurant pris au hasard nous a bien déçu. Alors cette fois-ci, on suit les conseils du Routard... et on fait bien. Même si c'est un peu plus cher, cela est sacrément meilleur. Une énorme pièce de viande très tendre dans l'assiette, avec de la bonne sauce et les condiments qui vont avec, nos estomacs jubilent.

Nous repassons par la piscine l'après-midi puis il faut faire nos sacs une dernière fois. Nous prenons un peu d'avance, notre avion ne décolle qu'à 2h du matin, mais il faut repasser la frontière et les bus ne fonctionnent plus en soirée. Nous partons vers 17h et passons la frontière. Le problème est que le bus n'attend pas que nous montrons patte blanche à la douane. Alors nous devons attendre le bus suivant. Le nouveau problème est qu'aucun d'entre eux ne se pointe...

Au bout d'une bonne demi-heure, la nuit approche et toujours aucun bus pour nous ramasser. Sandra a une envie subite de lever le pouce, mais l'autostop ne donne rien, les camions ne vont pas dans le bon sens et aucune voiture ne prête attention à nous. Nous avançons à pied, tentant toujours le stop, et je commence à envisager un taxi vu la pauvreté du transport public. Une voiture s'arrête finalement. Ils ne nous font pas monter, puisqu'ils vont seulement 200m plus loin, mais nous donne une information en or: il y a un arrêt de bus à 500m... et c'est par là que passe le bus pour l'aéroport. C'est un bingo!

Finalement, plus besoin d'aller jusqu'au centre de Foz do Iguaçu, et nous arrivons largement à temps à l'aéroport où nous commençons notre nuit sur les bancs puis carrément par terre. Puis nous embarquons... et décollons. Quelques temps plus tard, à travers le hublot, nous apercevons des tours de béton sous un ciel gris. Bonjour São Paulo.

Itaipu binacional

En cette quasi fin de périple, nous avons rendez-vous avec l'une des plus grande construction humaine: le barrage d'Itaipu, "la pierre qui chante" en langue tupi-guarani. Nous repassons la frontière et arrivons à 11h15 aux portes de la zone réservée au barrage. On se rend vite compte que tout est bien préparé pour la visite. Il y a d'ailleurs deux types de visites, soit la rapide pour seulement voir l'extérieur, soit la visite complète extérieur/intérieur. Ingénieurs dans l'âme et en l'honneur de la fameuse galette (!), nous optons pour la complète. Manque de bol, la prochaine visite ne commence qu'à... 14h... oh, à peine 3h d'attente. Beleza. En plus, il y aurait bien un écomusée à visiter mais il est en travaux (comme un musée sur 4 au Brésil...). Nous nous consolons lorsque je me rends compte que Sandra ne paye que demi-tarif, comme moi, avec ma carte étudiante grâce à une erreur de l'employé!

Un casse-croûte plus tard, nous pouvons commencer la visite par une vidéo de 30 minutes vantant le barrage. L'énergie hydroélectrique est une énergie propre (ou presque...), le barrage est un bijou d'ingénierie (civile, électrique...), tout a été fait pour ne pas perturber la faune et la flore (où comment expliquer aux poissons qu'ils ne peuvent plus remonter la rivière par là) et pour aider les populations locales (et construire quelques cabanes aux indiens que l'on a dégagé).

Nous montons ensuite dans un bus (trop) climatisé et deux guides nous parlent du barrage, successivement en portugais et en anglais, pendant que nous nous approchons de la bête, construite en commun entre le Brésil et le Paraguay, à cheval sur la frontière. Le barrage est constitué de trois partie principales: une en béton armé où se situe les turbines et toute la partie électrique, l'autre en remblai de gros cailloux et la dernière est un remblai de terre. Il n'est pas en béton sur toute la longueur pour une raison de prix, et n'est pas en remblai sur toute la longueur pour une raison évidente de résistance à la pression de l'eau. La partie la plus haute étant bien sûr celle en béton.

Et le moins que l'on puisse dire c'est que la plus grosse usine de production hidroélectrique du monde* est un monstre... quelques chiffres:

- 196m de hauteur max, équivalent à un immeuble de 65 étages
- près de 8km de long
- 20 turbines d'une puissance totale de 14.000 MW
- le débit de seulement deux turbines est proche du débit total de toutes les Chutes d'Iguaçu (en période normale)
- 40.000 ouvriers sur le chantier lors de la construction
- une cadence maximum équivalente à la construction d'un immeuble de 22 étages toutes les 55 minutes lors de la construction
- une quantité de béton équivalent à 210 stades du Maracanã
- une quantité de fer équivalent à 380 Tour Eiffel
- un terrassement équivalent à 8,5 celui nécessaire à la construction du Tunnel sous la Manche
- et en 2008, le record de production fût atteint, avec 94,68 milliards de kWh... soit plus clairement: 90% de l'énergie électrique du Paraguay et 19% du Brésil.

Le bus passe sur le barrage et marque un arrêt pour nous laisser observer la retenue d'eau formée par le barrage: le réservoir. Celui-ci s'étend sur 13.500km². C'est drôle de se dire qu'avant il y avait une vallée avec ses animaux, ses arbres et ses habitants... là où il y a maintenant plusieurs dizaines de mètres d'eau. La formation de ce lac a notamment fait disparaître les Sete Quedas (= Sept Chutes), des cascades réputées dans tout le pays et même au-delà. Un tel sacrifice environnemental ne serait certainement plus autorisé de nos jours.

Ensuite nous nous dirigeons vers les turbines. D'abord, nous pouvons toucher les énormes conduits amenant l'eau jusqu'aux turbines: 10m de diamètre et 700 mètres cubes d'eau (la moitié des Chutes d'Iguaçu) passent chaque seconde à quelques centimètres de mes doigts. Puis, nous entrons à l'intérieur de cette cathédrale de béton. Nous passons devant une série de photos relatant la construction, débutée en 1975 pour terminer en 1982. J'en profite pour réviser le cours que j'ai eu sur les barrages l'année dernière... Nous observons le CCO (Centre de Contrôle des Opérations) depuis lequel tout est surveillé. Les 11 personnes qui y travaillent ne sont pas surmenées, puisque tout est automatisé aujourd'hui. Mais en cas de problème, il faut être opérationnel. Cela a dû être le cas le 10 novembre 2009 lorsque qu'un problème au niveau d'Itaipu a plongé 30% du territoire brésilien dans le noir total. Pour l'anecdote, la moitié des employés du complexe sont paraguayens, les autres sont brésiliens. La parité est également respectée dans le CCO: 5 paraguayens, 5 brésiliens et la frontière passe pile au milieu de la pièce. Et le 11ème, il est argentin?! Non, le 11ème, c'est le chef, et comme l'équipe change toutes les 6 heures, le chef est tantôt d'un pays, tantôt de l'autre. La bi-nationalité, un concept important à Itaipu.

Après le cerveau, un ascenseur nous emmène au cœur d'Itaipu. Quelques dizaines de mètres plus bas, nous pouvons voir un des 20 rotors en action. La photo qui est à droite ne vous donne ni le son, ni la chaleur ambiante... mais bon.


* Petite précision: avec ce record, Itaipu est la plus grosse centrale hydroélectrique du monde au vu de l'énergie produite en un an, mais en terme de puissance, le barrage des Trois-Gorges prend la tête avec 22.500 MW... mais la rivière Parana possède un débit beaucoup plus régulier tout au long de l'année, ce qui n'est pas le cas de son homologue chinois).

Paraguay

Allez, on ne dépêche puisque nous devons nous rendre dans 3 pays aujourd'hui! L'Argentine, c'est fait, nous y dormons. Nous partons donc à la gare routière... vers 11h. Heureusement, que nous nous sommes dépêchés...

Et le bus nous fait traverser la frontière, un nouveau tampon argentin plus tard, nous attendons le bus au Brésil, direction Ciudad del Este, au Paraguay. Deuxième frontière de la journée, cette fois-ci, aucun tampon. Zut, j'en voulais un du Paraguay, j'en ai encore jamais eu.

L'intérêt de la "Ville de l'Est" réside dans une foultitude de shoppings, de magasins et d'étals en tous genres dans les rues, vendant de tout: des vêtements, des parfums, des appareils électroniques... La proximité de la frontière a permis la création d'un immense bazar où les brésiliens peuvent venir dépenser leur R$ tout frais dans les caisses de paraguayens qui n'attendent que cela. Déjà que les brésiliens ont un pouvoir d'achat bien supérieur à leurs voisins, la force du R$ sur les marchés en ce moment ne fait que renforcé le phénomène. Malheureusement pour Sandra et moi, nous on a surtout de l'Euro tout faible. Et puis les paraguayens sont tellement soulants à venir harceler les passants pour acheter une paire de chaussettes ou un appareil photo, que nous nous lassons assez vite.

A noter que dans les plus beaux shoppings, les prix sont affichés en Dollars américains. Il n'y a pas que des beaux shoppings, aussi des étals plus ou moins sales, et des enfants qui errent dans les rues pour vendre des chewing-gum ou ramasser des déchets, un faux air de Bolivie quoi.

Nous, nous avions retirer des Pesos argentins pour l'occasion, pas vraiment la référence dans le coin. Même au fast-food du coin, cela perturbe tout le monde. Nous, en train de recalculer 10 fois le coût final selon les conversions monétaires. Pour une glace à R$6, elle a failli nous rendre R$14 sur un billet de 20Ar$. Nous aurions finalement gagner environ 3€ pour manger une glace. Dommage que son collègue compte mieux qu'elle.

Nous décidons d'échapper à cet immense capharnaüm. Reste à trouver le bus. Nous attendons non loin de la frontière, scrutant l'horizon en quête d'un bus allant vers le Brésil. A côté de nous, une maman lave sa petite fille dans une bassine, avec une éponge salle et du produit vaisselle, à quelques centimètres des pots d'échappement et des déchets le long du trottoir. A peine le pied posé dans la bassine, l'eau devient toute noire, et le petit bout de chou ressort encore à moitié poussiéreuse de sa douche improvisée.

Finalement, nous partons à pied puisque aucun bus ne daigne apparaître. Un jeune argentin en fait de même. Toujours aucun contrôle à la frontière, et donc aucun tampon. Heureusement, nous pouvons marquer notre passage au Paraguay par une photo au milieu du pont traversant la rivière séparant les deux pays.

Après notre troisième tampon argentin en 2 jours, nous arrivons à l'auberge et nous rendons compte que l'argentin rencontré un peu plus tôt loge dans la même auberge que nous. Que le monde est petit.

Et 1... 0

Aujourd'hui a eu lieu le match amical France-Brésil... amical ou pas, il fallait que les Bleus gagnent, à la fois pour sauver l'honneur après la Coupe du Monde pitoyable et pour que je puisse chambrer les collègues au stage, et non l'inverse!

C'est chose faite avec cette courte victoire 1-0. La France reste la bête noire de la Seleção. Les Tricolores ont éliminé les Auriverdes en 1986, 1998 et 2006 et depuis 1992, le Brésil n'a pas remporté un seul match contre la France. Allez les Bleus!

Foz

Et le bus nous amène à notre dernière étape des vacances, à l'extrême Ouest de l'état du Paraná, à la limite du territoire brésilien: Foz do Iguaçu. Nous devons rejoindre la ville argentine de Puerto Iguazu le jour même ayant déjà réserver notre auberge. L'Argentine est censée être un peu moins chère que le Brésil (mais ce sont des pays qui, chaque année, deviennent de moins en moins avantageux pour les voyageurs européens, donc c'est le moment d'y aller... avis aux amateurs). Nous trouvons le bon bus, sans l'aide du centre d'informations touristiques qui est fermé. Finalement, il faut deux bus, un pour rejoindre... le terminal de bus, l'autre pour passer la frontière.

Après avoir reçu notre (premier) tampon argentin, nous rejoignons l'auberge. Un tampon que le fonctionnaire a eu la bonne idée de placer juste à côté de mon Visa étudiant... en espérant qu'aucun employeur brésilien ne viendra m'enquiquiner parce que mon Visa est un peu entaché par l'encre du pays voisin tant dédaigné. Et pourtant, il me reste encore des pages blanches, pour le moment...

En chemin, nous rencontrons Michiel, un hollandais, qui nous se joint à nous pour aller visiter les fameuses chutes l'après-midi. Pour observer cette merveille de la nature, il est possible de se rendre du côté argentin ou brésilien. Pour notre part, nous ferons seulement l'argentin, réputé plus complet et plus impressionnant, au plus près des chutes, même si l'autre côté offre une meilleure vue d'ensemble.

Une fois sur le site, où je ne paye que demi-tarif en tant que "résident brésilien", un petit train nous emmène à une passerelle slalomant sur le lit de la rivière Iguaçu, signifiant "grandes eaux" en langue indienne Guarani. Déjà, la rivière impressionne par sa largeur et son débit. Plus nous marchons et plus nous approchons de la Garganta del Diablo (= la Gorge du Diable), la principale des 275 chutes composant le "complexe Iguaçu". De la fumée semble s'échapper derrière le prochain bosquet... un panneau indique une ancienne passerelle détruite durant la crue de 1992...

Et nous voilà à quelques pas du cratère. La terre se dérobe sous nos pieds (enfin, nous sommes toujours bien en sécurité sur notre passerelle, pas d'inquiétude) et des milliers, que dis-je, des millions de litres d'eau se déversent dans un canyon en fer à cheval de 80 mètres de hauteur. Nous observons quelques instants le monstre, tentant de prendre quelques photos malgré l'eau qui nous fouette le visage. Bah oui, c'est tout de même une douche version XX..... XL. A vrai dire, le débit varie autour de 1500 mètres cubes par seconde pour l'ensemble (500 en période de sécheresse, 6500 en crue), le numéro de chutes variant également (entre 150 et 275).


Nous nous dirigeons ensuite vers deux autres sentiers, le supérieur et l'inférieur. Les deux offrant différentes visions du site. Et c'est une succession de cascades, de magnifiques point de vue et de douches, en face, au-dessus, ou quasiment en dessous des chutes. Nous rencontrons également des fourmis énormes et une sorte de raton laveur en famille (des macutis ou un nom dans le genre). De chaque côté de la frontière, un parc national a été créé dans les années 30 et sont passés Patrimoine Mondial de l'Humanité en 1984 (Argentine) et 1986 (Brésil).


Cela ne semble pas nous suffire puisque nous embarquons dans un des bateaux pour aller prendre une nouvelle douche. Il nous emmène d'abord vers la Garganta del Diablo, s'approchant... de loin. Il fait demi tour et nous emmène près d'autres chutes, en s'approchant... très près! Là, quasiment impossible d'ouvrir les yeux sous la qua ntité d'eau dispersée aux abords des chutes. Puis, retour pour une autre douche sous la Garganta del Diablo. A bord, un petit bonhomme de 5 ans à peine n'a pas l'air de bien comprendre ce qui lui arrive tandis que mon appareil photo ne capture que des images assez éloigné des chutes, bien à l'abri dans le sac étanche fourni lors de l'embarquement lorsque nous somm es au plus près de celles-ci. Mais un gars filme le tout avec une caméra étanche pour vendre le DVD aux touristes. Rien n'est laissé au hasard.


Les chutes du Niagara et du Zambèze n'ont qu'à bien se tenir, je pense que celles d'Iguaçu n'ont rien à leur envier.

Déformation professionnelle

Petite pause dans le récit de ces vacances: je vais vous parler plus en détail des transports à Curitiba. Oui parce que cette ville a en quelque sorte lancé une mode suivie dans le monde entier: un système de bus pouvant atteindre la capacité d'une ligne de métro: le BRT (Bus Rapid Transit).

Depuis plusieurs décennies, la ville a mis en place une planification urbaine réfléchie et efficace. Les habitants craignaient que la croissance accélérée, notamment due à un fort exode rural, ne détériore leurs conditions de vie. En 1964, les propositions de l'architecte Jaime Lerner furent adoptées par la mairie pour planifier et contrôler ce développement.

Le plan prévoyait la création de 5 avenues principales, constituées de 3 voies de circulation dans chaque sens et d'un couloir de bus au centre. Au lieu d'une expansion radiale classique, la ville va ainsi se développer linéairement le long de ces axes de transport. La densité urbaine est régulée: au plus près des axes principaux, les grattes-ciel sont autorisés, et plus on s'éloigne, plus la hauteur maximale diminue. Sur la photo à droite, vous pouvez remarquer la concentration d'immeubles au centre, disposés plutôt linéairement, et les constructions beaucoup plus basse ailleurs.

Avec tout cela, Curitiba a inventé un nouveau système de transport, comparé à un métro de surface. Le réseau est composé de tronçons de grande capacité, destinés à relier le centre et la périphérie. Des bus articulés ou bi-articulés (de 170 à 270 passagers contre à peine une centaine dans un bus classique!) utilisent des couloirs entièrement dédiés. Un des principaux avantages de telles lignes, c'est le coût largement inférieur comparé à un tramway ou un métro: 1 km de métro à SP = 30 km de ligne BRT!

Le concept des stations d'embarquement est un des éléments clés de ce système. Les stations, en forme de tube, permettent aux usagers de payer avant d'entrer dans le bus. Dans le reste du pays, il y a toujours un "cobrador" en plus du chauffeur à qui il faut payer le ticket, retardant souvent la montée des passagers et consommant de l'espace à l'intérieur du bus. Les stations sont également adaptées au bus et permettent de rentrer de plein-pied dans le véhicule. L'embarquement et le débarquement est ainsi optimisé.

Ce système a été appliqué avec succès dans la capitale colombienne de Bogotá. Le concept a été encore plus poussé puisque chaque couloir de bus possède deux pistes, une normale et une express. La capacité de ces lignes est d'environ 45.000 passagers par heure et par direction, équivalent à une ligne de métro. Un système qui a révolutionné la ville. Et aujourd'hui, de nombreuses villes à travers le monde (Johannesburg, Jakarta...) s'inspirent ou se sont inspirées de ces exemples. En France aussi, quelques villes possèdent des versions allégées de BRT, appelées BHNS (Bus à Haut Niveau de Service) comme le Busway de Nantes.

En associant tout ceci à d'autres mesures comme la création massives de parcs ou l'incitation au traitement des déchets, Curitiba offre parmi les meilleures conditions de vie du Brésil à ses habitants. Des habitants plutôt contents, avec environ 89% d'approbation du système de transport... je me demande bien quel est ce taux à São Paulo...

Curitiba

Pour notre unique journée à Curitiba, puisque que nous partons le soir même pour Foz do Iguaçu en bus, nous devons d'abord régler le sort de nos sacs, pas vraiment envie de les porter toute la journée. De l'aéroport, nous partons donc pour la gare routière et son guarda-volume (= consigne). Nous avons déjà un premier aperçu de la ville, réputée pour offrir une qualité de vie largement supérieure à la moyenne brésilienne. En effet, bien qu'elle abrite environ 1,76 millions d'âmes, la ville semble plus agréable: pas de tours de béton à perte de vue, un système de transport plutôt efficace, moins de déchets dans les rues...

Curitiba est une des villes les plus riches du pays, et est parfois qualifiée comme la plus européenne des villes brésiliennes. Dans les années 70, de nombreuses mesures ont été mises en œuvre afin de promouvoir les transports en commun, mais aussi pour lutter contre la pauvreté ou la pollution. L'année dernière, Curitiba a même reçu le Prix Mondial de la Ville Durable et le Prix du Transport Durable... d'ailleurs je vous reparlerai de transports en détail plus tard.

Une fois nos sacs déposés, nous nous rendons au Marché Municipal de l'autre côté de la rue. Rien de spécial, nous achetons quelques fruits à un vendeur qui nous apprend qu'il a appris le français, il y a déjà longtemps... oui, il y quelques dizaines d'années, le français était enseigné dans les écoles primaires brésiliennes. Nous nous arrêtons ensuite au niveau des restaurants puisqu'il est l'heure de manger. Nous hésitons à manger des sushis hors de prix, puis nous remarquons un restaurant où pour R$10,50 (4,5€), il est possible de manger à volonté. Bingo!

Pour visiter la ville (même si à vrai dire, celle-ci n'est pas spécialement jolie), il existe un bus touristique: pour R$20 (9€), on peut monter quatre fois dans un des bus londoniens (mais verts) qui parcourent la ville en boucle. Vu la facilité de la chose, nous avons choisi cette option.

Première étape, le musée d'art contemporain Oscar Niemeyer, en hommage au célèbre architecte brésilien. Une expo de Vasarely et d'autres dont j'ai oublié les noms. Un des signes particuliers de ce musée, c'est "l'œil de Niemeyer", visible sur la photo ci-contre.

Deuxième étape, la tour Oi, du nom de l'opérateur téléphonique occupant les lieux. Du haut des 109m d'altitude, il est possible d'observer la région à 360°. J'en profite pour voir de mes propres yeux la politique urbaine mise en place, mais là dessus aussi, j'y reviendrai.

Troisième étape... euh dernière étape en fait, l'organisation des transports est meilleure que dans le reste du Brésil, mais la moyenne est assez faible. Au lieu d'avoir le passage d'un bus touristique toutes les 20 minutes comme vanté dans la brochure, il faut attendre entre 30 minutes et 1 heure pour qu'il en arrive deux ou trois d'un coup. Ainsi, ayant commencer le tour en début d'après-midi, il ne nous reste plus assez de temps pour profiter de tous nos tickets de bus. Tant pis, nous jetons un coup d'œil dans le centre où nous errons quelques temps. Nous en profitons pour manger une galette de tapioca dont Sandra raffole puis nous retournons à pied à la gare routière. C'est parti pour Foz do Iguaçu.