Congo - Moubangui

Nous déjeunons chez Clément après notre installation dans "l'auberge" du village. Quand je dis auberge, je veux dire des cabanes en bois, avec le sol en terre battue, la lumière avec la lampe à pétrole, un trou pour les toilettes au fond d'une cour et la douche au seau d'eau tirée au puits : l'équivalent d'un deux étoiles dans le système hôtelier congolais. En prime, la case du commissaire est toute proche, cela permet de l'entendre brailler après les hypothétiques "bandits". Ou leurs fantômes, j'avoue que l'on a du mal à saisir contre qui il s'énerve vraiment.

Le fils de Clément pleure dès qu'il aperçoit nos peaux de balancs becs. Le manioc trempe dans une bassine à côté, pour en retirer le mercure. Puis avec Clément, Gui (alias Guilite) et Alfred, tous trois travaillant dans le cadre de la mission avec le Père Lucien et financée par l'Union Européenne, nous allons à Moubangui. Pendant les 3,5 kilomètres de marche jusqu'au village, ils m'apprennent quelques mots de lingala et de benzélé, le dialecte pygmée. Une fois au village, son chef "papa René" nous accueille. Nous discutons un peu, Clément jouant le rôle de traducteur français-benzélé. Nous apprenons que le village s'appelle Moubangui du nom d'un grand arbre situé tout près (un iroko), qu'ils chassent à l'arbalète, ou encore qu'ils assèchent une portion de rivière pour pêcher ! Vêtu d'une veste d'un autre âge, le vieil homme René nous raconte aussi que c'est lui qui a souhaité implanté une école dans son village, et qu'il aimerait bien avoir un dispensaire aussi. Avant, c'était plus facile, il y avait tout dans la forêt, mais celle-ci est trop exploitée aujourd'hui...

Nous arpentons le village. Avec Adrien, nous tentons de dire bonjour aux autochtones : opangoaco (= bonjour) ! S'il répondent "hiiiii" avec un mouvement de tête, c'est gagné ! Mais certains ne répondent pas, tellement surpris que des blancs leur parlent dans leur langue. Un vieil homme nous salue. Ah non, Guilite m'indique qu'il nous demande des médicaments... il a la lèpre. Cruelle réalité.

Le soir, nous mangeons de nouveau chez Clément. La télé est branché sur TV5 Monde. Nous assistons à une série intitulée "les immigrés" avec un jingle mémorable : "je suis un immigré / je viens d'une lointaine contrée / mes racines sont ancrées en moi et j'en suis fieeeeeer". On suit les pérégrinations de plusieurs personnes originaires d'Afrique de l'Ouest vivant à Paris. Vient ensuite l'actualité mondiale : révolte en Thaïlande et en Ukraine, train qui déraille à New York. Puis France 2, avec Marie Drucker qui parle de chômage. Les congolais sont très au courant de ce qu'il se passe en France... mais peut-être devrait-il s'occuper d'abord de ce qu'il se passe chez eux !

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