Congo - Mangangi

Le lendemain, après avoir assisté à la fin de la messe en lingala (!), nous nous rendons à un autre village à moto. Aurélie a lancé quelques prières pour que la nuit prochaine, aucun rat ne revienne lui mordiller les pieds pendant la nuit et que les lucioles arrêtent de l'embêter quand elle va au fond de la cour...

Au village, nous sommes accueillis en grande pompe par les enfants et les professeurs. Nous serrons des poignées de main à tour de bras. Tellement contents, certains enfants repassent 5 fois, un grand sourire aux lèvres. On nous offre ensuite une bouteille de vin de palme. Verdict : c'est un peu fort mais pas mauvais si servi frais.

Nous passons dans la salle de classe et avons le droit à une démonstration. Le cours d'aujourd'hui : la lettre "i" ! Les voyelles sont le programme du 1er trimestre... une bonne cinquantaine d'enfants s'entasse sur une petite dizaine de bancs de l'Unicef. Ils apprennent à écrire la lettre 'i' en "4 étapes". Qui veut aller au tableau ? Tous les doigts se lèvent, frénétiques. Quand un élève est désigné, il redevient timide, s'avance penaud vers la surface noire et tente de reformer l'obscur pictogramme selon les ordres du professeur : " 'i', lisez ! iiiii ! 'i', c'est bien ? c'est bien !!!" et les autres enfants accompagnent leurs encouragements en battant la mesure sur les bancs.  Les meilleurs élèves seront envoyés à l'internat, et les meilleurs d'entre eux seront préparés pour passer des concours d'Etat ou devenir professeur.

Nous visitons ensuite le village. Nous saluons tout le monde et serrons tellement de mains que je me sens comme un homme politique en pleine période électorale : "c'est loin mais c'est beau !". Là aussi, nous rencontrons le chef du patelin, papa Barthélémy. Plus jeune que son homologue de la veille, il revient du travail des champs et semble bien fatigué. Nous voyons aussi la maisonnée du professeur Michel (à ma droite sur la photo) : 12 petits-enfants !

Sur le chemin retour, Clément tente de négocier de la viande de brousse. Un singe et quelques antilope gisent au sol... le braconnage est pourtant illégal. Le gars veut lui faire payer un peu plus... "ils ont peuvent payer eux" ajoute t-il en nous montrant du doigt...

Au village, nous passons devant le commissaire qui nous interpelle, cannette à la main, on ne change pas une équipe qui gagne :
- Je cherche les bandits !!
- Oui d'accord.
- C'est moi qui assure la sécurité. J'ai mes munitions !
- Oui d'accord (il a effectivement une kalachnikov à ses pieds et une arme de poing à la ceinture).
- Vous restez assis. Vous restez dans vos chambres !
- On va aller voir la rivière là. Mais vous inquiétez pas pour nous, tout se passe bien !
Et nous le laissons s'énerver tout seul...

Un peu plus tard dans l'après-midi, nous l'entendons pestiférer de plus belle. Pendant une demi-heure, il s'agite et braille dans la rue principale du village. Puis, "tac tac tac", une petite rafale de kalach est partie ! On ne se montre pas trop et on reste dans nos cabanes pour le coup. Mais il ne faudrait pas qu'il se décide à tirer ailleurs qu'en l'air, parce que je ne pense pas que les petites planchettes de bois composant les murs stopperont les balles.

Une heure plus tard, il est toujours en transe. On entend un nouveau coup de feu. Il balance un banc où étaient tranquillement assis des villageois. Il a été assigné ici par l'Etat... mais s'il continue comme ça, il va se faire tailler à la machette pour les habitants..

Le soir, le calme est revenu. Nous préparons notre départ avec Clément : sur ses conseils, nous prendrons une pirogue avec deux pinassiers pour nous rallier Epena. Il nous assure qu'une jouréne sera suffisant, à condition de partir tôt le matin pour ne pas prendre de risque. Cela reviendra moins cher qu'un moteur, et nous espérons ainsi voir plus d'animaux.

En soirée, nous assistons à une fête organisée par le village de Moubangui. Une fouée est allumée, les enfants chantent. Quelques uns s'équipent d'un costume de plantes et mènent une "danse des diables que l'on ne peut pas voir". Clément distribue du vin de palme et des cigarettes pour remercier les villageois. Puisque tout le monde n'a pas le droit aux cigarettes, un petit bordel s'installe. Nous revenons à Mboua et dînons avec Clément, et pour une fois, sa femme. Mais elle n'énoncera pas une parole, même si elle parle pourtant français. Une tempête commence alors que nous nous apprêtons à rentrer dans nos cases. La pluie martèle la tôle. En 10 minutes, c'est le déluge !

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